dimanche 9 octobre 2011

Les morues de Titiou Lecoq


C'est un roman qui commence comme cela :
« Au début, il y a la sonnette – et la porte qui s’ouvre et se referme sans cesse. Des pas qui résonnent dans l’entrée. Et des embrassades, des « ah », des « oh ». T’es déjà arrivé ? J’croyais que tu finirais plus tard le taff. Ouais, mais finalement j’ai bien avancé. Hé, Antoine on va pas parler boulot ce soir, hein ? Ça serait de la provoc ! Un brouhaha généralisé. Des verres qui tintent. T’as apporté les bougies ? Non c’était à Ema de le faire. »
Et c’est un roman qui commence aussi comme cela :
« Depuis une dizaine de minutes, Ema gardait la tête obstinément levée vers la voûte. En suivant des yeux les courbes compliquées des arches gothiques de l’église, elle espérait éviter de pleurer. Mais d’une elle commençait à avoir sérieusement mal à la nuque et de deux il devenait évident qu’elle ne pourrait pas échapper aux larmes de circonstance. »
C’est donc l’histoire des Morues, d’Ema et sa bande de copines, de ses amis, et, si l’on s’y arrête une minute, c’est le roman de comment on s’aime en France au début du XXIe siècle.
Mais c’est davantage.
C’est un livre qui commence comme une histoire de filles, continue comme un polar féministe en milieu cultivé, se mue en thriller de journalisme politique réaliste – au cours duquel l’audacieuse journaliste nous dévoilera les dessous de la privatisation du patrimoine culturel français - et vous laisse finalement, 500 pages plus loin sans les voir, dans le roman d’une époque embrassée dans sa totalité par le prisme de quatre personnages. (Au diable vauvert)


Ce livre a été une découverte à tout point de vue, déjà l'auteur car il s'agit de son premier roman, et pour le coup je suis aussi allée faire un tour son blog, ensuite c'est un livre de la rentrée littéraire et enfin j'ai découvert littérairement parlant la maison d'édition Au diable vauvert (le nom m'était connu mais je n'avais encore rien lu de chez eux).

J'ai bien aimé ce livre, il est drôle et sensible, c'est un roman moderne, en tout cas complètement ancré dans notre époque avec des personnages que l'on côtoie tous les jours.
J'ai beaucoup aimé la gouaille de l'auteur, c'est écrit comme on parle dans la vie de tous les jours mais par moment elle réussit à placer de ces mots et de ces tournures de phrases, histoire de nous rappeler qu'elle sait aussi faire de belles phrases et manier la langue française.
C'est plaisant à lire, il y a des passages drôles, d'autres plus graves (j'ai d'ailleurs retrouvé son ton d'écriture sur son blog).
Je trouve que c'est un bon reflet de la vie dans ce début de vingt-et-unième car il est question d'internet, de Myspace, des blogs, de Pôle emploi, de l'insécurité dans le travail et la difficulté de trouver un emploi pour les moins de trente ans.
Et puis les personnages d'Ema et de Fred se posent beaucoup de questions sur le sens de la vie, les relations amoureuses ..., questions que beaucoup de trentenaires ou quasi trentenaires se posent.
Les personnages ne sont pas caricaturaux, le lecteur finit vite par se sentir proche des morues, c'est presque triste lorsque le livre est fini car c'était devenu un vrai cercle d'amis dans lequel il était pris.
L'histoire est riche dans le sens où elle ne se cantonne pas à un polar féminin et à un éventuel complot lié à la privatisation du patrimoine culturel, c'est aussi une histoire d'amitié, des histoires d'amour, en résumé une projection sur un groupe d'amis en plein dans notre époque, de personnages qui se cherchent et cherchent une place dans la société.
Le titre est bien choisi et la couverture attire l'oeil, et même si elle laisse penser que ce livre fait partie de la "chick lit" il n'en est rien, le public visé est plus large et les thèmes abordés différents et moins stéréo-typés.
J'ai également apprécié la playlist à la fin de chaque chapitre, ça donne une ambiance à l'histoire.
Malgré le nombre de pages (près de 500) ça se lit assez vite et une fois le début passé l'histoire et les personnages sont prenants, et puis j'ai senti que derrière tout ça il y avait eu du travail et une construction.
C'est un bon premier roman assez bien réussi, reflet de la société actuelle et agréable à lire.

J'ai reçu ce livre dans le cadre de l'opération Masse critique, je remercie Babelio et les éditions Au diable vauvert pour ce très bon premier livre que j'ai pris beaucoup de plaisir à lire.

Ce livre a été lu dans le cadre du challenge ABC critiques 2011/2012 - Lettre L

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