vendredi 28 juin 2013

Un jour, une histoire : 28 juin 1914 #3

Le 28 juin 1914, l’archiduc François-Ferdinand, héritier de l’empire austro-hongrois, et son épouse la duchesse de Hohenberg, sont assassinés à Sarajevo par le jeune nationaliste serbe de Bosnie Gavrilo Princip.


Cette date de visite du 28 juin avait été choisie pour plusieurs raisons : jour de Vidovdan, une fête religieuse importante chez les Serbes orthodoxes, date anniversaire de la bataille de Kosovo Polje en 1389 qui vit la défaite des Serbes devant l’armé turque et l’annexion de leur royaume à l’empire Ottoman pour plus de 450 ans, date du quatorzième anniversaire de mariage du couple princier.

Une première tentative d’attentat a lieu le matin mais n’atteint pas l’archiduc, c’est une erreur d’itinéraire du chauffeur qui oblige la voiture à ralentir, donnant ainsi l’occasion à Gavrilo Princip d’ouvrir le feu sur le couple.

Avec deux coups de revolver, il tue sur le coup l’archiduchesse tandis que son mari décède dix minutes plus tard.

Tout commence dans la capitale de la Serbie, Belgrade, où le chef des services de renseignements, le colonel Dimitrievitch, dirige une organisation terroriste secrète : la Main Noire.
Celle-ci souhaite la réunion de tous les Slaves du Sud (i.e les Yougoslaves) autour de la Serbie, principal état slave balkan.
A l'étranger, elle encourage des mouvements politiques comme celui dont fait partie Princip.

Les conséquences de cet attentat seront dramatiques : rupture des relations diplomatiques entre l’Autriche-Hongrie et la Serbie, déclaration de guerre "préventive" de l’Autriche-Hongrie à la Serbie qui, par le jeu des Alliances, mènera à la Première Guerre Mondiale où l’Europe s’enfoncera pendant quatre années sombres.

jeudi 27 juin 2013

Hazard et Fissile de Raymond Queneau


Aux amateurs curieux d'explorer plus avant d'autres aspects de la personnalité de Raymond Queneau, et de son œuvre, nous présentons avec ce court texte inédit et inachevé une facette peu connue (oubliée ?) et pourtant récurrente et non négligeable de sa production littéraire, ancrée dans un " art de l'illusion " dérivé, semble-t-il, de la pratique du surréalisme et de Fantômas. (Le Dilettante)

"Hazard était assis depuis quelques instants devant un verre de limonade lorsqu'un personnage, presque aussi vieux que lui et le nez teinté de violet, vint asseoir la décrépitude de son corps tordu sur une chaise voisine et commanda une chartreuse tiède.", ainsi débute ce court texte inachevé de Raymond Queneau, et la suite sera du même acabit que cette ouverture.
Raymond Queneau s'amuse avec le lecteur et avec le texte. L'envie lui prend de changer les noms de ses personnages ? Et bien qu'à cela ne tienne, il le fait.
Il ne souhaite pas s'attarder sur un point : "Les sentiments d'Arthur, je ne m'amuserai pas à les décrire.", là encore il le fait.
Il a toute liberté avec son histoire et ses personnages, le lecteur ne maîtrise rien et n'a qu'à se laisser guider dans la lecture.
Après Boris Vian, je poursuis donc sur un autre texte surréaliste qui m'a nettement plus remuée et perturbée à la lecture que le précédent.
Déjà, il y a beaucoup de personnages et des rebondissements dans l'intrigue, il faut suivre et ne pas se laisser couler.
Ensuite, ça part un peu dans tous les sens tout en restant agréable à lire, et l'aspect surréaliste est renforcé par le recours à la prestidigitation pour certains personnages.
J'ai souri à plusieurs moments au cours de ma lecture, certains passages sont hilarants, et je n'ai pu que constater qu'une fois de plus dans la littérature les caniches en prenaient pour leur grade : "Il avait un compagnon dans sa solitude sans espoir, un caniche noir, adouci par les coups de bâton et bête comme un dictionnaire de rimes." (pour d'autres caniches maltraités littérairement, se rapporter à "L'élégance du hérisson" de Muriel Barbery).
Raymond Queneau était un grand amateur des aventures de Fantômas (notez à quel point j'ai été inspirée par cette lecture : je passe du caniche à Fantômas, aucun rapport) écrites par Pierre Souvestre et Marcel Allain et j'ai retrouvé quelques caractéristiques de ce personnage dans cette histoire, notamment dans le côté machiavélique et criminel de certains personnages.

"Hazard et Fissile" de Raymond Queneau n'est sans doute pas à mettre entre toutes les mains et je déconseillerai la découverte de cet auteur par ce récit, néanmoins il est intéressant à lire pour découvrir une autre facette moins connue de cet auteur et pour passer un moment littéraire quelque peu déjanté.

Livre lu dans le cadre du challenge ABC Critiques 2012/2013 - Lettre Q

mercredi 26 juin 2013

La première chose qu'on regarde de Grégoire Delacourt


Le 15 septembre 2010, Arthur Dreyfuss, en marcel et caleçon Schtroumpfs, regarde un épisode des Soprano quand on frappe à sa porte. Face à lui : Scarlett Johansson. Il a vingt ans, il est garagiste. Elle en a vingt-six, et elle a quelque chose de cassé. (JC Lattès)

Si Scarlett Johansson venait à sonner à ma porte, ça serait toujours l'occasion de bavarder avec elle autour d'un thé et de biscuits, mais comme il est peu probable, voire impossible, qu'une telle chose se produise, je me suis contentée de lire ce roman qui part sur cet événement : un soir, Scarlett Johansson sonne à la porte d'Arthur Dreyfuss, garagiste dans le nord de la France.

Je ne vais pas y aller par quatre chemins, autant j'avais aimé "La liste de mes envies" et ressenti un avis plus mitigé sur "L'écrivain de la famille", autant ce troisième roman de Grégoire Delacourt m'a déçue.
Le postulat de départ est complètement improbable, ça n'a ni queue ni tête, le problème c'est que ça reste ainsi et que tout ce roman est bâti sur une idée qui aurait pu être plaisante à lire, tout comme l'astuce mise en place par l'auteur, si elle avait été traitée différemment et si elle avait évolué au cours du récit.
Ici, j'ai eu l'impression que Grégoire Delacourt détruisait lui-même son idée, et je ne parlerai même pas de la fin qui est franchement lamentable tellement elle est téléphonée depuis le départ.
Arthur Dreyfuss est peut-être un gentil garçon, mais sincèrement il n'attire pas la sympathie du lecteur, en tout cas il n'a pas eu la mienne et a eu plutôt tendance à m'agacer et à avoir envie de lui coller des baffes.
A moins que l'auteur n'ait cherché à illustrer la bêtise d'un homme qui ne regarde chez une femme que sa poitrine, et où plus il y en a mieux c'est, ce personnage est globalement raté et n'a pas grand chose pour lui, hormis le fait de ressembler à Ryan Gossling en mieux (pour ma part, ce critère n'a aucune valeur ne trouvant pas ledit acteur si beau que cela).
Certes, il essaie de faire bien ce garçon, il sort de temps à autre de grandes phrases et réfléchit profondément à comment mener sa relation naissante avec Scarlett Johansson, la plus belle femme du monde (ce n'est pas moi qui le dit mais un magazine) : "Il se tut parce qu'on ne domestique pas l'impossible, une fille comme Scarlett Johansson, dans l'impétuosité, l'urgence; il faut de l'élégance, une forme de renoncement.".
Heureusement qu'il y a ce personnage féminin, avec son côté Marilyn Monroe (d'ailleurs je ne visualisais pas Scarlett Johansson à la lecture mais plutôt cette actrice) dans la façon dont les hommes l'appréhendent, pour qui j'ai ressenti une grande sympathie et beaucoup de tristesse, c'est même sans doute le seul élément positif à tout ce roman.
Que de guimauve distillée au fil de ce récit, et ça y va les grandes déclarations dégoulinantes d'amour et là j'ai envie de me mettre à chanter "C'est beau mais c'est insupportable, c'est un pudding bien lourd, de mots doux à chaque phrase", sauf qu'en guise de quiches et de salades ce sont plutôt des pâtes au fromage que nos amoureux se mitonnent, tout en partageant des moments d'émotions extrêmes avec des serments à la vie à la mort sur l'amour et la chance qu'ils ont eus de se rencontrer : "Les nouvelles rencontres, en tout cas celles qui semblent importantes, font toujours cet effet : on n'a pas sommeil, on voudrait ne plus jamais dormir, se raconter sa vie, toute sa vie, partager les chansons qu'on aime, les livres qu'on a lus; l'enfance perdue, les désillusions et cet espoir, enfin; on voudrait s'être toujours connus pour s'embrasser, s'aimer, en connaissance de cause, en confiance, et se réveiller au matin en ayant l'impression d'être ensemble depuis toujours et pour toujours; sans la peine amère de l'aube.".
Révélation : Grégoire Delacourt écrit du Harlequin désormais ! (oui parce qu'il y a aussi la petite scène chaude décrite avec des mots alambiqués)
Et pour couronner le tout, il a cru bon d'interpeller le lecteur, de ponctuer ses phrases d'explications entre parenthèses, de notes personnelles sur ce qu'il a mis dans son roman.
Personnellement, ça m'a agacée, prodigieusement.
Il reste une réflexion de fond sur l'âme humaine, noire et pessimiste et qui, dans un autre contexte, m'aurait sans doute plus interpellée qu'elle ne l'a fait au cours de ma lecture.

"La première chose qu'on regarde", phrase hautement évocatrice de ce qui intéresse les garçons (et pas que de voir sous les jupes des filles mais aussi ce qu'il y a dans leur décolleté), pourrait bien être le dernier roman que je lirai de Grégoire Delacourt tant j'ai été déçue par le contenu et par le style de l'auteur.
Une histoire dont l'amour dégoulinant à toutes les pages à annihilé le caractère féroce, dommage.

L'écume des jours de Boris Vian


Un titre léger et lumineux qui annonce une histoire d’amour drôle ou grinçante, tendre ou grave, fascinante et inoubliable, composée par un écrivain de vingt-six ans. C’est un conte de l’époque du jazz et de la science-fiction, à la fois comique et poignant, heureux et tragique, féerique et déchirant. Dans cette œuvre d’une modernité insolente, livre culte depuis plus de cinquante ans, Duke Ellington croise le dessin animé, Sartre devient une marionnette burlesque, la mort prend la forme d’un nénuphar, le cauchemar va jusqu’au bout du désespoir. Mais seules deux choses demeurent éternelles et triomphantes : le bonheur ineffable de l’amour absolu et la musique des Noirs américains… (Le Livre de Poche)

J'avais découvert ce roman il y a plusieurs années et j'ai eu envie de le relire.
Grand bien m'en a fait, car je ne me souvenais pas de certaines choses et j'ai découvert certains niveaux de lecture que je n'avais pas soupçonnés lors de ma première découverte de cette oeuvre.
Il y est beaucoup question d'amour, sous toutes ses formes : l'Amour avec un grand A, celui de Colin et de Chloé, l'amour familial, de Nicolas envers sa nièce Alise, l'amour intéressé de Chick et Alise, unis par leur fascination de l'écrivain Jean-Sol Partre, l'amour physique de Nicolas pour Isis, l'amour du jazz de l'auteur, musiques et références omniprésentes dans tout le roman.
Mais comme le dit la chanson : "Les histoires d'amour finissent mal en général", il est aussi beaucoup question de la mort, souvent désinvolte, inaperçue, et ne choquant pas les esprits, comme celle des patineurs qui sont éliminés de la piste pour faire place nette, ou la fin de Jean-Sol Partre, au café, assassiné comme Jean Jaurès; mais aussi une mort qui détruit l'Amour, la Vie, le Bonheur et conduisant les êtres à errer dans le malheur, le désespoir et la pauvreté.
Les personnages ont d'ailleurs une conception particulière de l'argent, il est bien vu d'en avoir mais comme finit par dire Cholé : "A quoi ça sert, ça n'empêche rien.".
Si l'amour engendre l'amour, l'amour engendre aussi la mort, et la mort appelle la mort.
Vision plutôt pessimiste de la vie, et que l'auteur choisit de traiter de manière forte et engagée, au travers d'une galerie de personnages variés, Colin en tête de fil : "Toi non plus, tu ne ressembles à rien de connu.".
Si Cholé et Colin représentent le couple idéal, l'amour absolu, bien que je 'en ai pas le sentiment à 100%, Chick illustre les travers du fanatisme avec sa passion extrême à l'encontre de Jean-Sol Partre qui le conduit à se ruiner pour acquérir ses oeuvres et ses objets au détriment de son sa vie personnelle et des personnes qui l'aiment.
En ce sens, Chick est l'inverse du personnage de Colin alors qu'ils sont les meilleurs amis dans la vie.
Le personnage de Colin est tout de même central et moteur pour tous les autres : "Ce qui m'intéresse, ce n'est pas le bonheur de tous les hommes, c'est celui de chacun.", avec un coeur énorme et toujours prêt à aider les autres pour qu'ils soient comme lui, heureux, et refusant de croire que les personnes peuvent changer : "Les gens ne changent pas. Ce sont les choses qui changent.".
Sans doute un petit côté candide mais qui arrive à émouvoir le lecteur.
La mort est également très présente, qu'il s'agisse d'assassinats ou de maladies.
C'est le personnage de Chloé qui porte en lui la maladie et ce, assez tôt dans le roman.
Difficile de ne pas voir dans ce nénuphar qui lui pousse dans le poumon un cancer qui coloniserait petit à petit son corps.
La maladie a pour conséquence d'entraîner la ruine, car Colin dépense toute sa fortune en fleurs pour sauver Cholé, et il doit alors travailler bien qu'il ait cela en horreur.

Il ne faut pas être rebuté par l'aspect surréaliste de ce roman, l'espace n'est jamais défini, la maison d'adapte au gré de l'humeur de ses habitants (plus la maladie s'installe plus elle rétrécit et moins le soleil pénètre dedans), et le lecteur perd tout repère par rapport à son mode de pensée et de vie.
Ainsi, il est mal vu de travailler, d'être pauvre, un ouvrier gagne bien mieux sa vie qu'un ingénieur, et Boris Vian a peuplé son récit d'inventions toutes plus improbables les unes que les autres.
Ce qui frappe sans doute le plus, c'est que dans cet univers aux codes modifiés les personnages agissent de façon cohérente.
Boris Vian distille aussi au cours de son récit une critique envers la religion, et ce par deux fois.
Au cours du mariage, elle est avide d'argent et Dieu fait l'honneur d'y assister, c'est l'inverse pour l'enterrement; ainsi qu'une critique sous-jacente de la guerre, avec des fusils qui poussent tels des fleurs.
Et au milieu de ce tumulte, il y a la petite souris grise à moustaches noires, spectatrice de cet univers qui s'effrite pour sombrer dans un marécage de désespoir.

Lecture intemporelle, "L'écume des jours" de Boris Vian reste un récit bouleversant et original sur des bien des aspects, qui ne cesse à chaque fois de surprendre le lecteur pour le transporter dans un monde à la fois surréaliste et à la fois proche de celui qu'il connaît et qu'il côtoie tous les jours.

mardi 25 juin 2013

Une page d'histoire et autres nouvelles de Romain Gary


Qu'ils soient ambassadeur à Istanbul ou collectionneur d'art et amateur de belles femmes, soldats, prisonniers oui survivants de la guerre, tous les héros de Romain Gary sont des victimes du désespoir et de la folie humaine. Ils se débattent, s'agitent comme de pauvres pantins désarticulés et tentent en vain de résister aux forces qui les entraînent malgré eux... Quelques nouvelles poétiques, souvent cruelles et désabusées, d'un grand magicien du rêve. Quatrième de couverture Qu'ils soient ambassadeur à Istanbul ou collectionneur d'art et amateur de belles femmes, soldats, prisonniers ou survivants de la guerre, tous les héros de Romain Gary sont des victimes du désespoir et de la folie humaine. Ils se débattent, s'agitent comme de pauvres pantins désarticulés et tentent en vain de résister aux forces qui les entraînent malgré eux... (Gallimard - Folio)

A travers ces cinq nouvelles, Romain Gary présente le genre humain sous plusieurs aspects, et pas toujours les meilleurs.
"Le luth", nouvelle la plus longue qui ouvre ce recueil, est la plus puissante de toutes.
Rien n'y est dit explicitement, tout s'y devine, et c'est ce qui fait la force de ce récit sur un ambassadeur amateur d'art et les inquiétudes de sa femme à son sujet : "Mais quel péril intérieur pouvait donc craindre un être dont toute la vie n'avait été qu'une longue journée de soleil, d'une visibilité parfaite, un lent et tranquille épanouissement d'une personnalité dans une vocation ?".
Si pendant une première partie c'est l'ambassadeur qui occupe de le devant de la scène, c'est sa femme qui prend le dessus dans la deuxième et aide le lecteur à mieux comprendre le pourquoi du comment : "Peut-être, pensait-elle, peut-être allait-il malgré tout arriver à l'âge de la retraite sans scandale, sans même que le monde s'aperçût ...".
Voilà une excellente entrée en matière et une belle leçon de littérature de Romain Gary qui rend à la nouvelle toutes ses lettres de noblesse.
Rarement drôles, ces nouvelles ont un goût d'amertume et d'acidité, de revanche et de mal fait à autrui, à l'image de la cinglante nouvelle "Le faux" où la maxime "Tel est pris qui croyait prendre" est éclairée sous un jour nouveau : "Vous voyez qu'il n'y a pas que mon Van Gogh qui est faux : le chef-d'oeuvre de votre collection l'est aussi."; ou encore de celle "Les habitants de la Terre", où la naïveté atteint son paroxysme avec un aveugle restant aveugle et imperméable à la méchanceté et à la cruauté humaine : "Il ne faut pas toujours imaginer le pire.", tandis que la jeune fille qu'il accompagne est réellement aveugle mais tout aussi naïve que son compagnon, elle a toutefois l'excuse d'avoir été traumatisée par la guerre et de vivre dans une forme de monde parallèle où plus rien ne l'atteint vraiment, c'est une âme vide dans une enveloppe charnelle : "La belle faveur de soie rose était défaite. Le maquillage s'était brouillé, le rouge des lèvres était répandu sur les joues, sur le cou. La fermeture Eclair de la jupe était arrachée. Elle tirait maladroitement sur un bas qui refusait de tenir.".
Non seulement ces personnages sont naïfs, mais ils trouvent encore des excuses à ceux qui agissent mal : "Le pauvre, sans doute avait-il mal compris ce qu'on lui disait.", suscitant ainsi l'indignation et la colère du lecteur.
J'avoue ne pas en avoir cru mes yeux en lisant cette nouvelle et sa chute qui conclut par la même occasion ce recueil.
Et si certains personnages sont naïfs, d'autres sont au contraire extrêmement lucides, à l'image de ce prisonnier dans la nouvelle "Une page d'histoire" : "Si les poux peuvent lire l'avenir, s'il existe une puissance mystérieuse pour les avertir et les sauver à temps, tous les espoirs sont vraiment permis.".

Magnifique galerie de personnages qu'offre Romain Gary dans ces nouvelles, sous une plume toujours maîtrisée et extrêmement agréable à lire tant le style de l'auteur est plaisant et intelligent.
Une bonne façon de découvrir ou de redécouvrir cet écrivain marquant et incontournable de la littérature française.

Top Ten Tuesday #2


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani.

Votre top 10 des livres lus en 2013 jusqu’à maintenant

Thème pas très évident à faire car jusqu’à présent je n’ai eu que peu de coups de cœur sur mes lectures 2013 (certaines lectures m’ont fortement plu mais je ne les qualifierai pas pour autant de coup de cœur).
A noter que je ne me limite pas aux romans mais également aux bandes dessinées ou romans graphiques.

1) "Seul dans Berlin" de Hans Fallada : une histoire originale se passant dans le Berlin des années 40 avec l’avènement du régime Nazi, un point de vue rare en littérature et toujours intéressant à découvrir ;
2) "Maus un survivant raconte" d’Art Spiegelman : depuis le temps que je cherchais à lire cette bande dessinée … Au final, c’est un gros coup de cœur et une claque littéraire, à mon sens un incontournable qu’il faut avoir lu au moins une fois ;
3) "La fenêtre panoramique" de Richard Yates : décidément un coup de cœur pour cet auteur qui croque avec justesse la vie américaine dans les années 50 ;
4) "Olympe de Gouges" de Catel Muller et José-Louis Bocquet : un pavé en roman graphique mais une mise en lumière réussie d’une femme, Olympe de Gouges, peu connue finalement du grand public ;
5) "La folie du roi Marc" de Clara Dupont-Monod : deuxième lecture de cette auteur et deuxième très bon moment avec une mise à mal de la légende de Tristan et Yseut ;
6) "Le temps de l’innocence" d’Edith Wharton : parce qu’un roman d’Edith Wharton est toujours grinçant et plaisant à lire ;
7) "L’année du déluge" d’Eduardo Mendoza : découverte de cet auteur espagnol à travers une histoire muy caliente en Catalogne ;
8) "La petite fille du Vel d’Hiv" d’Annette Muller : un témoignage bouleversant d’une survivante de la Rafle du Vel d’Hiv ;
9) "Chroniques de Jérusalem" de Guy Delisle : une bande dessinée très intéressante retraçant une année de vie de l’auteur à Jérusalem et permettant de saisir, en partie, toute la complexité de cette ville ;
10) "Le boulevard périphérique" de Henry Bauchau : un livre exigeant à la lecture et d’abord difficile mais une belle découverte littéraire ;
10 Ex-aequo) "Lira bien qui lira le dernier – Lettre libertine sur la lecture" de Hubert Nyssen : un essai littéraire sous forme de lettre à une lectrice imaginaire, lecture peu habituelle pour ma part mais qui s’est révélée plaisante.

En joker, parce qu’il s’agit d’une relecture, je mettrai aussi "Suite française" d’Irène Némirovsky.

dimanche 23 juin 2013

Challenge d'été - Destination PAL par Lili Galipette

Le capitaine de bord, Lili Galipette, est heureux(se) de vous accueillir à bord d'Air Galipette pour une destination estivale vers notre PAL (Pile A Lire).

Avant le décollage, merci de lui consacrer quelques instants pour le rappel des consignes de sécurité :
- veuillez ne pas attacher votre marque-page à un seul livre;
- les issues de secours se situent à chaque page;
- en cas de dépressurisation, des romans tomberont de chaque étagère.

Le personnel de bord d'Air Galipette reste à notre disposition durant toute la durée du vol.

Avant de décoller, assurez-vous que votre PAL est à jour.

Lili Galipette propose donc un challenge d'été visant à réduire nos PAL.
Du 1er juillet au 31 août, le but est de faire diminuer nos PAL et d'y faire de belles découvertes de certains trésors littéraires que nous avons laissés s'enterrer dedans.

J'ai choisi de participer avec ma PAL intégrale, et non une PAL d'été, cela a aussi été l'occasion de la mettre à jour (pour les nouveautés mais également pour les livres lus car oui, elle descend la coquine, j'ai commencé à l'attaquer depuis quelques semaines déjà).

Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter un bon vol en compagnie de tous les participants au challenge et également d'en profiter pour passer de bonnes vacances !


Bilan du challenge - Livres lus

"Il était une fois en France Tome 1" de Fabien Nury et Sylvain Vallée
"Il était une fois en France Tome 2" de Fabien Nury et Sylvain Vallée
"Il était une fois en France Tome 3" de Fabien Nury et Sylvain Vallée
"Il était une fois en France Tome 4" de Fabien Nury et Sylvain Vallée
"John l'enfer" de Didier Decoin
"Mildred Pierce" de James M. Cain
"Tess d'Urberville" de Thomas Hardy
"Le mille e un'ora di Asterix" de René Gosciny et Albert Uderzo
"Astérix légionnaire" de René Gosciny et Albert Uderzo
"Amours en marge" de Yoko Ogawa

A noter "L'énigme des Blancs-Manteaux" de Jean-François Parot que je n'ai pas pu finir avant le 31 août et que je n'inclue donc pas dans le bilan.

Au final, je suis mitigée. Je suis certes contente d'avoir sorti des livres de ma PAL, ce que je continue d'ailleurs à faire, d'autant plus que j'ai beaucoup aimé ces lectures, certaines sont mêmes des coups de coeur; mais je suis déçue du nombre, je souhaitais en lire plus que 14, j'aurais sans doute dû moins papillonner en août avec des livres empruntés à la bibliothèque et plus m'intéresser à certains qui dorment dans ma PAL.
Le bilan que je tire de ce challenge, c'est que parmi toutes ces lectures, je n'ai pas eu une seule déception, ce qui m'incite à continuer à m'intéresser à ma PAL et aux pépites qui y dorment, pour certaines depuis trop longtemps.

Merci à LiliGalipette pour l'organisation de ce challenge ! 

vendredi 21 juin 2013

Un jour, une histoire : 21 juin 1943 #2

Jean Moulin, né le 20 juin 1899, est surtout connu pour ses faits de Résistance et le rôle majeur qu’il a joué dans l’unification des mouvements de Résistance et la création du Conseil National de la Résistance.
Mais sans tout cela, il aurait de toute façon laissé son nom à la postérité puisque de 1925 à 1930 il fut le plus jeune sous-préfet de France, en poste alors à Albertville ; et en janvier 1937 il est devenu le plus jeune préfet de France en étant nommé préfet de l’Aveyron.
Révoqué de son poste de préfet d’Eure-et-Loir par le Régime de Vichy en 1940, il décide très vite d’aller à Londres où il gagne la confiance du Général de Gaulle qui le charge alors d’unifier les mouvements de résistance et tous leurs différents services (propagande, renseignements, sabotage, entraide) sur le territoire Français.
C’est aussi dans cette année 1940 que se trouve la raison du port de son écharpe : arrêté en juin 1940 par les Allemands, il tente de se suicider en se tranchant la gorge avec un rasoir par peur de céder sous la torture et de parler.


En février 1943, Jean Moulin se rend à Londres et revient en France le 21 mars 1943, avec pour mission de créer le Conseil National de la Résistance dont la première réunion en séance plénière se tiendra à Paris le 27 mai 1943.

Mais son destin bascule le 21 juin 1943, une journée après son quarante-quatrième anniversaire.
C’est dans une maison à Caluire-et-Cuire, en banlieue lyonnaise, louée par le Docteur Dugoujon, que se tient une réunion avec plusieurs responsables de la Résistance : Albert Lacaze, Raymond Aubrac, André Lassagne, Bruno Larat.
Non convoqué, René Hardy se rend aussi à cette réunion.
Mais en milieu d’après-midi, la Gestapo, dont le chef local est Klaus Barbie, connu aussi comme "le boucher de Lyon" encercle la maison et arrête tous ses occupants.


Arrêté et interrogé au Fort Montluc par Klaus Barbie, Jean Moulin alias Max ne dira rien, mais la Gestapo finit par identifier cet homme comme le chef de la Résistance.
Il est transféré à la Gestapo de Paris où il est torturé.
Il meurt le 8 juillet 1943 des suites des tortures et des interrogatoires subis dans le train qui le conduisait en Allemagne.

Le 19 décembre 1964 il entre au Panthéon des grands Hommes de la République Française accompagné d’un discours resté célèbre d’André Malraux dont voici un extrait :

"Comme Leclerc entra aux Invalides, avec son cortège d'exaltation dans le soleil d'Afrique et les combats d'Alsace, entre ici, Jean Moulin, avec ton terrible cortège. Avec ceux qui sont morts dans les caves sans avoir parlé, comme toi ; et même, ce qui est peut-être plus atroce, en ayant parlé ; avec tous les rayés et tous les tondus des camps de concentration, avec le dernier corps trébuchant des affreuses files de Nuit et Brouillard, enfin tombé sous les crosses ; avec les huit mille Françaises qui ne sont pas revenues des bagnes, avec la dernière femme morte à Ravensbrück pour avoir donné asile à l'un des nôtres. Entre, avec le peuple né de l'ombre et disparu avec elle - nos frères dans l'ordre de la Nuit... "

jeudi 20 juin 2013

Alger la noire de Jacques Ferrandez et Maurice Attia


Alger, fin janvier 1962. Sur l’une des plages de la ville, on retrouve les cadavres nus de deux jeunes gens enlacés. Elle est européenne, lui arabe. Il est émasculé et son dos arbore, gravées au couteau, les trois lettres « OAS ». Exécution presque ordinaire au titre du nettoyage ethnique, comme on pourrait le penser en ces temps plus que troublés ? Ou bien l’assassinat de Mouloud et d’Estelle cache-t-il autre chose ? S’échappant de la terne routine de son commissariat de Bab El Oued, l’inspecteur Paco Martinez mène l’enquête flanqué de l’irascible Choukroun, le vieux flic juif qui lui sert de mentor. Rythmées par les plasticages et les règlements de compte, qui ne cessent d’empoisonner un peu plus une atmosphère déjà irrespirable, leurs investigations les conduiront dans les coulisses et les arrières cours bien peu reluisantes de la grande ville, entre passions politiques, affairisme, banditisme, moeurs dissolues et violence omniprésente. Oui, décidément, Alger la blanche pourrait tout aussi bien s’appeler Alger la noire… 
Trois ans après avoir mis un point final à ses Carnets d’Orient, Jacques Ferrandez renoue avec sa passion pour Alger à l’orée des sixties, dans un grand polar bien sombre inspiré du roman de Maurice Attia. (Casterman)

Adapté du roman éponyme de Maurice Attia, "Alger la Noire" plonge le lecteur au cœur d’Alger, en 1962, en pleine guerre d’Algérie qui connaîtra son épilogue quelques mois après la fin de l’histoire et pendant la bataille de Bal-El-Oued et la fusillade de la rue d’Isly.
C’est au milieu des explosions de bombes et des plasticages que l’inspecteur Paco Martinez flanqué du vieux flic Choukroun vont enquêter sur le double meurtre d’une jeune fille française de bonne famille et d’un jeune algérien.
Sur le dos du jeune homme, une inscription : OAS.
Mais est-ce vraiment l’OAS qui aurait ainsi signé ce double meurtre ou faut-il voir une autre signification dans ce sigle ?
C'est en tout cas ce que suggère Irène, la maîtresse de Paco : "OAS ... c'est peut-être "oraison pour un amour secret".".

Dans cette Algérie déchirée, un tel meurtre en devient banal tant il y a de morts tous les jours, et cela n'émeut pas grand monde qu'un jeune algérien ait été assassiné, certains penseraient même que c'est bien fait pour lui, parce contre, que la fille d'un homme ait été influent, cela nécessite une enquête de police, mais sans trop approfondir non plus pour ne pas dévoiler au grand jour des secrets de famille.
Le contexte de l'Algérie dans les années 60 est très bien rendu dans cette bande dessinée, à la fois dans l'histoire et dans le dessin.
Les pieds-noirs ne se font pas d'illusions, même né en Algérie ils savent que bientôt ils devront quitter leur pays pour la France, comme le laisse entendre Choukroun, le vieux flic qui a à peu près tout vu dans sa carrière : "Je pars en éclaireur. Quand tu viendras à ton tour, je t'apprendrai les nouvelles règles du jeu ... Ca sera facile pour personne de s'habituer à la France et aux français. Ils vont pas nous accueillir à bras ouverts, c'est sûr ...".
C'est une histoire noire, sordide, mais parfumée aux dernières effluves d'une Algérie encore française pour quelques mois : "L'Algérie est bientôt indépendante, les pieds-noirs sont en marche pour l'exil ... le pays est plongé dans une guerre fratricide et une haine définitive entre les communautés ... Alger la blanche est devenue Alger la noire.".
C'est également complexe, à la fois pour trouver le coupable et la raison de ce double meurtre mais aussi dans les relations entre les personnages.
Paco est un homme torturé qui vit dans le remords de ne pas avoir accompagné sa maîtresse Irène lors d'une soirée où elle a perdu une jambe suite à l'explosion d'une bombe, il s'en veut mais il l'aime également comme elle est et se confie à elle, ils ne sont pas mariés mais ils ont leurs habitudes de couple : "Aux rituels ... On s'engueule, on baise, tu m'allumes une clope ... et je fume ... l'ordre des choses.".
Ce couple a un côté touchant et revêt une forme d'amour idéal.
Cette histoire est très humaine, elle véhicule beaucoup de sentiments ; l'amour, charnel ou filial, l'amitié, la haine, la violence, c'est un véritable prisme des relations humaines et le contexte rend cet aspect encore plus fort.
Elle laisse également peu place à l'espoir, je n'en suis pas ressortie heureuse, mais je lui reconnais une certaine forme de beauté, particulièrement dans le graphisme et les couleurs qui sont vraiment magnifiques et justifient à eux seuls la lecture de cette bande dessinée, qui m'a transportée au cours de ma lecture dans l'Algérie des années 60 et m'a ainsi permis d'avoir un aperçu des tensions qui régnaient à l'époque et des communautés qui se déchiraient.

"Alger la noire" est une très belle adaptation par Jacques Ferrandez du roman de Maurice Attia qui permet au lecteur de remonter le temps et de vivre les derniers mois de l'Algérie française ainsi que le basculement dans la haine de deux communautés.
Cette bande dessinée a également le mérite de m'avoir donné envie de découvrir l'oeuvre originale dont elle s'est inspirée.

mardi 18 juin 2013

Gossip Girl Tome 6 You're the one that I want de Cecily von Ziegesar


Welcome to New York City's upper East Side, where my friends and I live in gorgeous apartments, go to exclusive private schools, and make Manhattan our own personal playground. Our college acceptance letters are arriving today. Those who do best will act all shocked and modest; the ones who fail miserably will declare how unimportant it all is, even though they secretly know how they are doomed. But after today it's time to get back to what's important : our love lives. Can't wait for this day to be over so the real fun can begin!! Good luck, everybody. (Bloomsbury)

Bienvenue dans le monde de l'Upper East Side, où la jeunesse dorée de Manhattan oublie dans des soirées leur inquiétude quant à leur avenir : Yale ? Brown ? Columbia ?
Quelle université les accueillera l'année prochaine ? Tous leurs souhaits seront-ils exaucés ? Et question cruciale : Blair sera-t-elle accepté à Yale, son rêve depuis toujours ?
A moins que la question ne soit plutôt : perdra-t-elle sa virginité et avec qui ?

Tout en gardant à l'esprit la série télévisée et les acteurs qui incarnent les personnages, je n'ai pu que constater, une fois encore, que le roman a le trait plus féroce, ne serait-ce que parce que les personnages sont poussés à l'extrême.
Ainsi, Serena est déconcertante à plus d'un titre : elle ne se rend jamais compte de la portée de ses actions et n'éprouve aucun regret, qu'il s'agisse d'objets ou de garçons : "She had a habit of picking things up without even realizing she was doing it. Lemonade, boys ..."; elle papillonne sans jamais se fixer, passe d'un garçon à l'autre, en embrasse un un jour et un autre le lendemain, à ce niveau, ce n'est même plus un coeur d'artichaut qu'elle a : "Maybe it wasn't true love she wanted after all. Maybe it was just ... love. And that was all around her."; elle est assez superficielle mais d'un autre côté, elle sait composer avec l'affichage public et médiatique que Gossip Girl fait avec elle, et en profite, dans une certaine mesure.
J'ai constaté que Nate avait un peu plus de plomb dans la cervelle, il est moins léger que dans les autres opus et ce n'est pas plus mal car entre Serena et lui, c'était un festival d'inconséquences.
Quant à Chuck, s'il est plus présent il reste encore trop en recul par rapport aux autres.
Là où je suis plus que dubitative, c'est avec Dan, j'en suis limite allergique tant ce personnage est caricatural à la limite du grotesque, mais sa relation avec Vanessa a un petit côté mignon et sa soeur Jenny est attachante.
Mais encore une fois, c'est le personnage de Blair que je trouve le plus réaliste et le plus attachant, et pourtant elle n'est pas épargnée par l'auteur.
J'aime son côté gentil sous un aspect rugueux, elle a honte de la grossesse de sa mère à son âge mais elle l'aide pourtant en l'accompagnant aux cours d'accouchement et s'occupera de sa petite soeur; c'est aussi une travailleuse qui va connaître des déconvenues avec les réponses des universités mais elle a aussi du caractère : "But Blair had never been one to forgive and forget easily.".
Toute cette histoire est croquée par Gossip Girl, une mystérieuse blogueuse (ou un, pourquoi pas), qui est toujours très au courant de tout ce qui se passe.
Cette lecture, plutôt légère, prend une autre saveur après avoir été à New York et parcouru des lieux où se passe l'action, comme Central Park. Je trouve aussi que cette histoire pourrait difficilement se situer dans une autre ville, elle y perdrait son charme, et l'auteur sait de quoi elle parle, elle maîtrise les codes de cette élite pour qui le reste du monde n'a que peu de grâce à leurs yeux et n'hésite pas à bien les écorcher.

"You're the one that I want", référence explicite à la chanson de "Grease", est un bon opus de la série Gossip Girl qui se lit avec légèreté et un certain plaisir pour se détendre, tout en étant grinçant sur la haute société New Yorkaise avec un(e) Gossip Girl qui en gratte le vernis pour mieux mettre à nu cet univers de mesquineries et de coups bas où il est plus important de paraître que d'être.

Livre lu en VO

Livre lu dans le cadre du challenge ABC Critiques 2012/2013 - Lettre Z


Livre lu dans le cadre du challenge New York en littérature 2013

Top Ten Tuesday #1


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.
Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani.

Les 10 livres à lire cet été (Votre PAL pour cet été)

Comme je viens de m’inscrire au challenge d’été Destination PAL de LiliGalipette, j’ai remis à jour ma PAL et je profite de ce rendez-vous pour en extraire les 10 livres que je me fixe comme objectif de lire (plus si possible mais ceux-là me tiennent à coeur).

1) "Noire lagune" de Charlotte Bousquet
2) "Aucun de nous ne reviendra" de Charlotte Delbo
3) "Beignets de tomates vertes" de Fannie Flagg
4) "Avec vue sur l’Arno" d’E. M Forster
5) "Le sillage de l’oubli" de Bruce Machart
6) "La mort à Venise" de Thomas Mann
7) "Amours en marge" Yoko Ogawa
8) "Une fenêtre au hasard" Pia Petersen
9) "A l’ouest rien de nouveau" de Erich Maria Remarque
10) "Des souris et des hommes" de John Steinbeck


Je mets en joker "Chez les heureux du monde" d’Edith Wharton

vendredi 14 juin 2013

Un jour, une histoire : 14 juin 1791 #1

Promulguée en France le 14 juin 1791, la Loi Le Chapelier, du nom de l’avocat au Parlement de Bretagne puis député patriote aux Etats-Généraux, interdit les organisations ouvrières, notamment les corporations des métiers, les rassemblements paysans et ouvriers et le compagnonnage.


Cette loi est la suite logique du décret d’Allarde des 2 et 17 mars 1791 et interdit les coalitions de métiers et les grèves.
L’article second de cette loi énonce que "Les citoyens d'un même état ou profession, les entrepreneurs, ceux qui ont boutique ouverte ne pourront, lorsqu'ils se trouveront ensemble, se nommer ni présidents, ni secrétaires, ni syndics, tenir des registres, prendre des arrêtés ou délibération, former des règlements sur leurs prétendus intérêts communs".


Cette loi révolutionnaire avait été pensée à l’origine pour mettre fin aux dérives corporatistes de l’Ancien Régime mais entravera au 19ème siècle la création de syndicats.

Elle sera abrogée en deux temps : le 25 mai 1864 par la loi Ollivier qui abolit le délit de coalition, et le 21 mars 1884 par la loi Waldeck-Rousseau qui légalise les syndicats.

jeudi 13 juin 2013

Au coeur du mal de Chelsea Cain


Gretchen Lowell est une beauté fatale. Au sens littéral. L'inspecteur Archie Sheridan a traqué pendant dix ans cette tueuse qui a fait plus de 200 victimes. Il connaît bien ses méthodes, gravées en lui pour toujours – sa poitrine porte la cicatrice en forme de cœur que Gretchen a dessinée avant de lui administrer une injection mortelle. Personne ne sait pourquoi elle l'a ranimé. Ni pourquoi elle a appelé les secours, provoquant ainsi sa propre arrestation. 
Deux ans plus tard, Gretchen est en prison mais Archie n'est pas libre pour autant. Seules ses pilules lui permettent de tenir. Et la relation malsaine qu'il entretient avec son ancienne tortionnaire le trouble bien plus qu'il ne veut se l'avouer… 
Quand un nouveau serial killer survient, Archie est rappelé sur le devant de la scène. Cette fois pas de tête-à-tête entre lui et le tueur, car une jeune journaliste est de la partie. Tout comme Gretchen, qui, tapie dans l'ombre de sa cellule, est plus dangereuse que jamais… (Pocket)

Hannibal Lecter aurait-il trouvé son double féminin ?
A la lecture de ce quatrième de couverture, c'est la première question qui vient à l'esprit.
Et après lecture de ce roman, il s'avère que non.
Gretchen Lowell n'est pas une Hannibal Lecter au féminin, elle est plus complexe que cela, tout en gardant un caractère de superbe, un aura incroyable, un côté machiavélique prédominant le tout derrière un visage d'ange et un corps de déesse : "Elle n'était pas jolie. Le mot ne convenait pas. Jolie suggérait un côté adolescent. Gretchen possédait une beauté mûre, sophistiquée, pleine d'assurance. Plus que la beauté, elle irradiait le pouvoir de la beauté.".
Et puis il y a deux ans, elle a salement amoché un flic, et je ne parle pas que physiquement, elle aurait pu se contenter de cela, mais elle l'a aussi détruit psychologiquement pour le façonner à sa façon, pour qu'il ne pense plus que par elle, qu'elle soit sa drogue et sa raison de vivre.
Malsain ? Complètement.
Car Archie Sheridan a Gretchen Lowell dans la peau, dans tous les sens du terme.
Et quand il revient sur le devant de la scène pour mener une enquête sur un nouveau tueur en série, c'est drogué de médicaments avec une dose de shoot quotidien de Gretchen Lowell qui peuple ses nuits et sa vie : "Chaque fois qu'il fermait les yeux elle était là, sa présence fantomatique le réclamait, sa beauté lui coupait le souffle. Jusqu'au jour où il avait fini par céder et l'avait attirée à lui, sur lui. Il savait qu'il avait tort, que c'était pervers. Mais il était malade, il avait besoin d'aide, et personne ne pouvait l'aider. Alors quelle importance ? Tout cela était virtuel.".

L'intérêt de ce roman policier ne tient pas tant dans son intrigue que dans la relation perverse et hautement addictive entre Gretchen Lowell et Archie Sheridan.
Après une multitude de meurtres, la demoiselle aurait dû mourir, mais comme elle a passé un marché, elle est emprisonnée à vie et manipule encore à distance la vie d'Archie Sheridan.
Finalement, des deux je me demande si Gretchen dans sa cellule n'est pas la personne la plus libre : "Mais aujourd'hui Gretchen était en prison et lui, Archie, était libre. Pourtant, curieusement, il avait parfois l'impression que c'était l'inverse.".
Gretchen est très présente dans le récit et dans l'atmosphère qui s'en dégage.
L'auteur a réussi assez habilement à tenir le lecteur en haleine et il n'attend plus qu'une chose : une confrontation entre Gretchen et Archie.
Autant dire que cette scène est sans doute l'une de mes préférées.
L'intrigue policière est intéressante, mais pas autant que cette relation perverse, et d'ailleurs l'auteur la met plus en avant.
C'est là l'un des reproches principaux que je fais à ce roman : en dehors des deux personnages centraux, les autres sont relégués au second voire au troisième plan, quant à la journaliste Susan, je n'ai été que moyennement emballée par son personnage un peu trop décalé et torturé et qui n'apporte pas un intérêt total au bon déroulement de l'intrigue.
Il faut dire que face à des personnages aussi forts et charismatiques que Gretchen et Archie, les autres apparaissent en demi-teinte.
Quant à l'intrigue, les ficelles sans être trop évidentes, peuvent toutefois se deviner car l'auteur ne ménage pas de réelle surprise et laisse traîner des pistes dans son récit.
A la lecture de ce premier roman d'une série, il m'est apparu que si j'ai aimé cette lecture, l'auteur ne devrait pas toutefois s'éterniser à en faire trop et qu'il vaudrait mieux régler cette histoires en trois volumes, ce qui avait été initialement prévu, car si cette relation pimentée m'a tenu en haleine elle pourrait aussi finir par me lasser à trop tourner en rond sans jamais se conclure.
Comme il s'agit de son premier roman, j'espère que l'auteur saura se renouveler et ne pas se cantonner à ces deux personnages.

"Au coeur du mal" de Chelsea Cain est un roman policier efficace qui plante un décors bien sombre et introduit surtout deux personnages à la relation aussi mystérieuse que perverse : Gretchen Lowell et Archie Sheridan, auxquels le lecteur devient très vite attaché et suit avec délectation les joutes verbales et la relation de manipulation à distance.

La petite fille du Vel d'Hiv d'Annette Muller


16 juillet 1942 : la petite Annette a 9 ans. Après avoir vécu l’enfer du Vel d’Hiv, elle est internée avec sa mère et son jeune frère Michel à Beaune-la -Rolande. Elle connaît le sort terrible des milliers d’enfants juifs internés dans les camps du Loiret, cruellement séparés de leur mère, puis envoyés à Auschwitz – d’où aucun n’est revenu… Annette, elle, échappe à la déportation. Elle est l’une des rares enfants du Vel d’Hiv qui ont survécu. (Le Livre de Poche)

Annette Muller est l'une des rares survivants de la Rafle du Vel d'Hiv, elle est aussi l'une des très rares enfants survivants de cette même rafle.
Quand on sait qu'à peine une centaine de personnes raflées sont revenues de déportation et que sur les 4 000 enfants raflés seuls quelques uns ont survécu, soit parce qu'ils s'étaient enfuis du Vel d'Hiv ou des camps de Pithiviers ou Beaune-la-Rolande, soit parce que, comme Annette et son frère, ils ont été libérés pour être placés dans des institutions, le témoignage d'Annette Muller ne peut être qu'intéressant.

J'ai découvert Annette Muller il y a deux ans, à l'occasion des débats autour du film "La Rafle" et j'ai été frappée qu'un tel témoignage soit resté si discret et secret.
La honte de l'Etat Français ne pourrait à elle seule justifier ce silence coupable qui entoure cet événement tragique de l'été 1942, et à la lecture de l'introduction du livre, j'ai su : Annette Muller a dû se battre pour que son récit soit publié, d'abord dans une version raccourcie se limitant à la Rafle, puis dans son intégralité avec les années d'après guerre que la jeune Annette a passé dans la maison des enfants du Mans.
Il n'est décidément pas bien vu en France d'évoquer cette période, même si le silence commence à se briser et d'ailleurs, je remercie Annette Muller d'avoir persévéré pour que son histoire soit connue de tout le monde.
Annette Muller revient donc sur son enfance, sa place d'avant-dernière et unique fille d'une fratrie de quatre enfants, sur ses parents et leur origine, ainsi que sur les raisons de leur installation en France.
A la fin de la guerre, il ne restera de la famille que le père et les quatre enfants, la mère ayant été gazée à Auschwitz en 1942 et toute la famille restée en Pologne décimée.
Cela fait froid dans le dos de lire que des familles entières ont été décimées, certaines n'existaient même plus.
J'ai aimé cette partie du récit car elle permet de planter le décor, il y règne la joie de vivre, et j'ai souri aux anecdotes d'Annette Muller sur les bêtises qu'elle a faites petite fille.
J'ai aussi pu me rendre compte des conditions de vie à cette époque, de comment était Paris.
C'est un récit vivant aux couleurs sépia qui fait renaître toute une époque.
Puis, Annette Muller aborde la guerre, où le climat de peur s'installe au fur et à mesure : fuir Paris pour la campagne, puis y revenir, jusqu'au durcissement des lois raciales en 1942.
Annette Muller a gardé à l'esprit durant tout son récit qu'elle se devait de le raconter avec ses yeux de petite fille, c'est en tout cas ce que j'ai perçu et c'est l'une des choses que j'ai le plus appréciées dans son récit.
Ainsi, quelle elle évoque le camp de Drancy et les rafles des Juifs, c'est avec une métaphore d'enfant : "Ils étaient là et, subitement, ils n'étaient plus là. On les mettait dans ces tours d'où ils ne revenaient jamais. Un voile épais de mystère, de murmures effrayés, de larmes, les recouvrait. De cela, nous, les enfants, étions conscients ainsi que de la menace qui pesait sur les pères et les frères aînés.".
Ce que les gens voyaient de Drancy, c'était les tours de la Cité de la Muette, ce qui se passait à l’intérieur restait un mystère jusqu'au moment où on se retrouvait derrière les barbelés.

Puis, vient le moment de la Ralfe.
Pas besoin de grands mots ou de grands discours, Annette Muller va à l'essentiel.
Je dirai miraculeusement, sa mère réussit à faire échapper les deux aînés, pour elle, Annette et son frère Michel, ça sera l'enfer du Vel d'Hiv : le bruit, l'odeur, la crasse, le manque d'eau et de nourriture; avant le camp de Beaune-la-Rolande.
Annette Muller décrit les conditions de vie très difficiles, le départ des mères avant les enfants, les policiers français qui séparent mères et enfants aux coups et aux jets d'eau; et puis il y a la maladie, les épidémies qui galopent et Annette Muller rend un bel hommage au petit garçon mort à Beaune-la-Rolande, le premier enfant à mourir, qui fit son voisin au Vel d'Hiv, et la douleur éperdue de la mère.
Puis, c'est le départ pour Drancy.
Pour Annette Muller la Rafle s'arrête ici, elle et son frère sont libérés du camp, tandis que tous les autres enfants sont déportés.
Annette Muller leur rend d'ailleurs un très bel hommage :  "Partis en train pour un très long voyage. Mes amis qui, comme moi, faisaient des rêves. Ils sont tous morts, tous morts, tous morts.".

L'autre point fort de ce récit, c'est qu'Annette Muller ne s'arrête pas à la Rafle, elle raconte aussi ce qu'elle a vécu par la suite : être cachée par des religieuses dans une école catholique, la poussée de certaines religieuses catholiques vers cette foi au détriment de la religion Juive.
C'est un aspect souvent méconnu qui est décrit par Annette Muller, elle-même ayant embrassé le Catholicisme au cours de ces années.
L'aspect de culpabilité est aussi développé : celle d'être Juive, et par-dessus tout le caractère honteux d'être Juif : "Et ainsi, chaque fois qu'une réprimande collective était faite, je rougissais de honte, incapable de prouver mon innocence, souhaitant seulement qu'on ne s'aperçoive pas de mon état, craignant qu'un jour ou l'autre, on ne découvre le mensonge de ma vie, ma véritable identité, ma marque infamante de juive.".
Le seul petit reproche que je ferais au livre, c'est la fin un peu trop abrupte.
J'ai aimé lire les années d'après-guerre, ce qu'avait vécu Annette Muller et ses frères, à la maison d'enfants du Mans, ce caractère changé de tous ces enfants dont la majorité était orphelin, voire même sans plus aucune famille.
Annette Muller elle-même était devenue une enfant sauvage, il fallait un nouvel encadrement, de la discipline et elle à travers son livre elle rend aussi hommage au travail des moniteurs, particulièrement celui de Lotte, qui ont beaucoup fait pour ces enfants.
J'aurais vraiment aimé savoir ce qu'il était advenu d'Annette Muller après ses retrouvailles avec son père et la reprise d'une vie familiale.

"La petite fille du Vel d'Hiv" est un bel et émouvant témoignage d'Annette Muller, l'une des rares survivants de la Rafle du Vel d'Hiv, qui mérite d'être lu pour son importance historique et le côté très pudique et émotionnel de la narration.
Un récit essentiel qui apprend à chacun l'humilité, une belle leçon de vie et de courage pour mieux rationaliser les petits tracas de la vie quotidienne et surtout, pour ne pas oublier.

mercredi 12 juin 2013

Premier sang de David Morrell


Dans une petite ville américaine sans histoire, le shérif Teasle interpelle un jeune vagabond et, après quelques heures d’un interrogatoire musclé, lui ordonne de quitter la ville. Mais le jeune homme n’entend pas être traité de cette manière et le policier découvre à ses dépends que ce vétéran du Vietnam sait répondre à la menace. S'engage alors un duel sans merci, une chasse à l’homme mortelle à travers les forêts, les montagnes et les grottes du Kentucky. La police du comté, celle de l’État et les forces d’élite appelées en renfort ne seront pas de trop pour traquer l’ancien soldat que l’armée a transformé en une machine à survivre et à tuer. 
Des millions de spectateurs ont découvert la légende de John Rambo à l’écran. Il leur reste à se plonger dans ce roman au final surprenant, encore plus sombre et impossible à lâcher. (Gallmeister)

Autant l’annoncer de suite, je ne fais pas partie des millions de spectateurs qui ont découvert la légende de John Rambo à l’écran, et cela n’est sans doute pas plus mal car à mon avis le personnage de Rambo a dû sacrément être dévié pour l’adaptation cinématographique et l’acteur qui l’incarne.

D’une histoire somme toute banale, il va en découler une violence sanglante.
Parce que Rambo, jeune vagabond, refuse d’obéir au shérif Teasle lorsque celui-ci lui fait traverser la ville en voiture afin qu’il poursuive son chemin, et qu’il revient s’y installer, le shérif finit par l’appréhender et c’est au terme d’un interrogatoire musclé que Rambo va s’échapper nu du commissariat en laissant derrière lui le premier cadavre d’une longue liste : "Il s'était promis qu'il ne ferait plus jamais de mal à quiconque, et ce salaud l'avait poussé à tuer encore une fois. Si Teasle insistait, Rambo était résolu à se battre. Ce serait un combat que Teasle n'en finirait pas de regretter d'avoir déclenché.".
Il se réfugie dans la montagne mais le shérif Teasle se lance à sa poursuite, ce qu’il ne sait pas, c’est qu’il a face à lui un ancien Béret Vert de la guerre du Viêtnam et qui en est revenu décoré de la plus haute distinction militaire.
Et si Teasle est un ancien de la guerre de Corée, Rambo est une machine à tuer formée par l’armée américaine et endurci par des mois de captivité dans des conditions inhumaines au Viêtnam, la survie il sait ce que c’est et il connaît, et désormais il n’a plus qu’envie : faire exploser cette ville qui n’a pas voulu de lui.

Il serait réducteur de considérer ce livre comme un face à face entre ces deux protagonistes, il n’y a pas d’un côté le bien : le shérif Teasle, et de l’autre le mal : Rambo, ou inversement, mais deux personnalités qui s’affrontent tout en ayant l’une envers l’autre une forme de respect.
Certes, le livre est basé sur ce combat extrêmement violent, mais c’est aussi une lutte pour la survie et il faut surtout savoir lire entre les lignes.
Ainsi, le fait que Rambo soit un ancien Béret Vert du Viêtnam n’est pas innocent, en un sens l’auteur rend une forme d’hommage aux américains qui se sont engagés dans cette guerre, tout comme celle de Corée d’ailleurs, mais il dénonce surtout les méfaits et les conséquences de ces dernières sur l’être humain.
Rambo n’a plus grand chose d’humain, c’est une machine à tuer forgé pour survivre et qui n’a ni hésitation ni scrupule au moment d’appuyer sur la gâchette ou de manier le couteau.
Sans l’entrainement subi et sans la guerre, particulièrement sa période de captivité, il ne serait pas devenu ainsi : une machine sous une enveloppe humaine, à la limite sans âme ni conscience.
Il fait ce pour quoi il a été formé : survivre à n’importe quel prix et par n’importe quel moyen.
Certaines scènes sont particulièrement dures car elles montrent le mental de Rambo qui continue malgré une présence en territoire hostile et dans l’obscurité complète à chercher une issue.
La scène se déroulant dans l’ancienne mine est sans doute la plus représentative de l’entrainement militaire et du mental que cela exige et à la lecture de certaines descriptions j’étais à la limite d’avoir le poil hérissé sur les bras.
C’est l’un des avantages du récit de David Morrell, c’est très vivant dans les descriptions et très visuel également, ce qui permet au lecteur d’être dans la même situation (ou presque) que les personnages.  
L’auteur dénonce également l’absurdité de la guerre ainsi que le comportement paradoxal des américains : ils sont bien contents quand des jeunes gens s’engagent et vont se battre, mais quand ils reviennent complètement changés psychiquement ils les rejettent et n’en veulent pas, parce qu’ils offrent quelque chose qu’ils n’ont pas envie de voir : l’envers d’une guerre qui ne s’est pas déroulée sur leur territoire :
"- Moi, je ne tue pas pour vivre.
- Bien sûr. Mais vous acceptez un système où les autres le font pour vous. Et quand ils reviennent de la guerre, vous ne supportez pas l'odeur de mort qu'ils trimbalent avec eux. "
De façon plus générale, j’ai aussi perçu que cette absurdité s’appliquait en particulier à la guerre du Viêtnam.
Cette confrontation finit par prendre la forme d'une folie dans laquelle Teasle et Rambo finissent par plonger, chacun à sa manière. Ils repoussent les limites du corps humain pour aller au-delà de leurs capacités, dans le seul but que l'un finisse par anéantir l'autre, quitte à sombrer dans une forme de démence : "Je suis un, mais il ne pouvait se souvenir et il dut d'arrêter pour se reposer, le menton appuyé sur le bord d'un sillon, le soleil lui chauffant le dos. Pas s'arrêter. S'évanouir. Mourir. Bouge. Mais il ne pouvait pas bouger.".
Et puis, derrière toute cette histoire, il y a aussi l'importance de la figure paternelle, celle qui guide les choix et qui permet de devenir Homme.
Pour Teasle, elle prend la forme d'Orval, l'homme qui l'a élevé à la mort de son père; et pour Rambo il n'y en a pas vraiment mais son instructeur pourrait en quelque sorte tenir le rôle du père, Rambo vivant comme une sorte de trahison le fait qu'il se soit rallié aux policiers qui le traquent. 
David Morrell a su créer une atmosphère et un climat oppressant qui trouvent leur paroxysme dans la fin du roman, une fin somme toute inévitable et prévisible dès le début mais qui arrive encore à surprendre le lecteur.

"Premier sang" de David Morrell est un roman efficace et violent sur l’affrontement de deux personnalités que tout oppose mais surtout un plaidoyer pour la paix dénonçant les absurdités de la guerre et ses conséquences, ainsi que la difficulté à se ré-adapter à la vie civile et en société.


Je remercie Babelio et les Editions Gallmeister pour l’envoi de ce livre dans le cadre de l’opération Masse Critique.

mardi 4 juin 2013

Je reviendrai avec la pluie de Takuji Ichikawa


Takumi, un homme névrosé et atteint de troubles obsessionnels compulsifs, élève seul son fils de six ans depuis la mort de sa femme Mio. Il gère laborieusement le quotidien entre son travail, les tâches ménagères et l'éducation du petit garçon. Un jour Mio revient, comme elle l'avait promis avant son décès, à la saison des pluies, mais elle a tout oublié de son passé. (Flammarion)

Mio, la femme de Takumi, est décédée il y a un an, mais elle lui a promis avant de mourir : "Lorsque la saison des pluies sera de retour, je reviendrai sans faute voir comment vous vous débrouillez, tous les deux.".
La saison des pluies arrive, Takumi gère le quotidien avec son fils Yûgi comme il le peut, c'est-à-dire pas trop bien, et le miracle a lieu : Mio est de retour parmi eux pour six semaines, mais elle est amnésique.

Ce roman oscille entre différents genres : le conte, le fantastique, le contemporain, sans jamais s'accrocher à l'un. C'est à la fois une force et une faiblesse, car si cela plaît au lecteur pendant un temps et donne une forme poétique à l'histoire cela le déroute aussi.
Je me suis demandée pendant un temps dans quel type de roman je me trouvais.
A la fin j'ai fini par abandonner, mais cette absence de catégorie précise m'a aussi gênée.
Je n'ai jamais trop su comment interpréter le sens caché de l'histoire : un conte où la mort n'est pas une fin ? Une réflexion sur l'absence ? Le deuil ? Une déclaration d'amour à sa femme ? Ou alors une histoire fantastique avec fantôme ?
C'est sans doute ce qui m'a le plus gênée : l'absence de compréhension du sens caché de l'histoire, ou plutôt la multitude de clés possibles de lecture.
C'est pourtant, en général, l'une des marques de fabrique de la littérature japonaise.
Tout comme la forme poétique de l'histoire, qui ici n'a opérée que moyennement sur moi et sans doute que ce ressenti est en rapport avec ma difficulté de cataloguer précisément ce récit.
Je reconnais toutefois que l'auteur a su habilement jouer avec son histoire et le lecteur et le retournement final est surprenant et inattendu.
Ici, j'ai aussi été marquée par la confrontation de deux cultures : celle japonaise, très présente dans le quotidien de Takumi, notamment en ce qui concerne la cuisine; et celle occidentale, également présente dans le quotidien du personnage, notamment dans sa vision de l'amour, dans ses réflexions sur des personnes, des livres ou des films.
C'est un peu un choc des cultures dans lequel évoluent les personnages, mais cela va de pair à mon sens avec le côté fantastique.
Il y a également de très belles réflexions, comme celle-ci : "Les romans sont la nourriture du coeur. Ce sont les lampes qui illuminent les ténèbres, la joie qui surpasse l'amour.".
Les personnages ont tous un fond plus ou moins attachant, j'ai particulièrement aimé celui du professeur Nombre et de son chien Pooh.
Et puis à côté de cela, il y a aussi les trop nombreux "Hmm" et "Vraiment" qui ponctuent les dialogues et finissent par les rendre agaçants.
Ils sont utilisés à outrance et n'apportent à mes yeux rien aux dialogues, si ce n'est une transcription de l'oral à l'écrit.

"Je reviendrai avec la pluie" est un roman poétique mais qui n'a pas su complètement me toucher, qui frappe par son melting pot d'étiquettes littéraires qui peuvent lui être associées et par les deux cultures qui s'y côtoient : l'Occidentale et la Japonaise, ce qui en fait un roman hors cadre mais pas non plus totalement inintéressant à découvrir.

Livre lu dans le cadre du Challenge ABC Critiques 2012/2013 - Lettre I

lundi 3 juin 2013

Rien n'est trop beau de Rona Jaffe


Lorsqu'il fut publié en 1958, Rien n’est trop beau provoqua l'engouement de millions de lectrices américaines. Elles s'identifièrent à ces jeunes secrétaires venues d'horizons différents, employées dans une grande maison d'édition new-yorkaise, dont les rêves et les doutes reflétaient ceux de toute une génération de femmes. Si la ville semble leur offrir d'infinies possibilités professionnelles et amoureuses, chacune – l’ambitieuse, la naïve, la divorcée…- doit se battre avec ses armes pour se faire une place dans un monde d'hommes. (Le Livre de Poche)

"Rien n'est trop beau", premier roman de Rona Jaffe, s'attache à suivre le destin de quatre jeunes femmes, quatre rêveuses dont l'ambition est de croquer la Grosse Pomme, de s'y faire une place, un nom, ou à défaut d'y trouver un mari : "Par où pourrait-elle jamais attaquer cette forteresse ? Elle n'en avait même pas le désir. Tout ce qu'elle voulait, c'était rester ici jusqu'au jour où elle aussi deviendrait partie intégrante de la ville, où elle serait une de ces New-Yorkaises si belles et si soignées; mais cela aussi, c'était presque du domaine du rêve.".
Il y a Caroline Bender, dont les fiançailles ont été rompues pour cause que le fiancé a trouvé meilleure chaussure à son pied et qui souhaite se faire un nom dans le domaine de l'édition; April Morrison, une jeune provinciale naïve à la recherche du mari idéal et dont les hommes abuseront de sa gentillesse et de sa crédulité; Barbara Lemont, une jeune divorcée avec sa fille à charge et qui s'occupe aussi de sa mère; et Gregg Adams, une aspirante comédienne venue se faire un nom à New York.

"Les jeunes filles doivent faire quelque chose, de nos jours.", ainsi, en cette fin des années 50 il est de bon ton pour les jeunes filles d'occuper un emploi : dactylo, secrétaire, lectrice à la rigueur (point trop d'ambition non plus), en attendant de se marier et de fonder une famille.
Là, la femme arrête toute activité et se dévoue à sa famille.
Ce roman est clairement le reflet d'une époque et d'une génération de jeunes femmes, et avec ses quatre héroïnes : l'ambitieuse, la naïve, la rêveuse, la terre-à-terre, Rona Jaffe dresse un portrait fidèle de cette époque où les femmes cherchaient à s'affranchir, mais pas trop, et où les hommes ne les comprenaient pas : "On ne pouvait jamais savoir ce qu'une femme allait faire, et une fois qu'elle l'avait fait, on n'arrivait jamais à trouver une explication logique car elle ne savait probablement pas elle-même ce qui l'avait poussée.".
C'est aussi un portrait audacieux remis dans son contexte car l'auteur n'hésite pas à y aborder la sexualité féminine, le plaisir, l'avortement.
Toutes ces femmes veulent en découdre avec la vie : "Pour ceux que le présent favorise, il est facile d'oublier le passé, même si on n'y parvient jamais tout à fait.", laisser derrière elles le passé pour se forger un futur, une place, laisser sa trace.
A côté de ces première "business women", celles qui n'aspirent qu'à une vie de femme au foyer, sans ambition apparaissent bien futiles et vides à l'intérieur, les autres personnages ayant tendance à se moquer d'elles.
J'ai été frappée par la volonté de ces femmes et leur courage d'oser afficher leur indépendance vis-à-vis des hommes.
Cela n'était pas bien vu ni bien compris à cette époque, j'ai souri à la lecture car ça ne l'est pas forcément plus de nos jours et j'ai pu constater que les progrès ne se faisaient que petit à petit (certaines réflexions machistes s'entendent encore couramment de nos jours).
Pourtant, "Rien n'est trop beau" n'est pas non plus un roman féministe de "chienne de garde", l'auteur aurait pu être beaucoup plus dure avec les hommes, je la trouve presque trop gentille.
Si Caroline est le personnage central ce n'est pas celui qui m'a le plus touchée.
April Morrison n'a cessé de me rappeler Marylin Monroe, une femme belle, intelligente, mais dont les hommes s'arrêtent au physique et n'ont de cesse de l'utiliser comme un vulgaire objet pour satisfaire leurs désirs.
Certes, elle est naïve, mais les hommes qu'elle va fréquenter abuseront d'elle et de sa gentillesse, la laissant en femme fragile et meurtrie.
Barbara est également un personnage qui a su me toucher, par son côté courageux et volontaire, c'est aussi mon côté midinette qui parle mais je n'en dirai pas plus.
Ce récit volumineux se lit rapidement, j'ai apprécié l'ambiance de New York et ses lieux connus fréquentés par les héroïnes, il faut dire que j'en revenais et que j'ai commencé sa lecture là-bas.
Maintenant je reconnais aussi que j'attendais beaucoup de ce roman et au final je suis un peu déçue.
Il est bien mais ne me laissera pas non plus un souvenir impérissable et sera sans doute oublié assez rapidement.

"Rien n'est trop beau" de Rona Jaffe est un instantané sur la vie de jeunes femmes à la fin des années 50 cherchant à se faire une place à New York, à lire pour découvrir cette époque et le récit centré sur quatre jeunes femmes aussi différentes que courageuses et attachantes, et pour se plonger dans une ambiance typiquement New Yorkaise.

Livre lu dans le cadre du challenge ABC Critiques 2012/2013 - Lettre J



Livre lu dans le cadre du challenge New York en littérature 2013


Juin - End of Night Dido

A force de repousser depuis deux mois (il faut dire qu'à chaque fois je déniche une nouvelle perle), cette fois-ci j'ai décidé (enfin) de consacrer juin à Dido.
Pour ceux qui ne seraient pas au courant, l'anglaise douée a sorti un nouvel album récemment, album très réussi et que je vous invite vivement à découvrir.

Au passage, je signale que Sylla aussi a retenu cette chanson pour le mois de juin, et on ne s'est pas concerté toutes les deux !

Till the end

(Chorus)
I feel nothing when you cry
I hear nothing
Seen or need to cry
I could smile now
And turn away
Come over here so you can see me walk away
And celebrate the end of night
The end of night
The end of night
The end of night
The end of night

(Verse)
Only takes one lie
To bring this house down
Behind closed doors
No one tells the first time around

Pain is what's when
You bring it on yourself
The sweetest burning building
A love that couldn't last

You were ugly when the beat kicked in
And ugly when it left
And ugly all the way
Didn't see it till the end

(Chorus)
I feel nothing when you cry
I hear nothing
Seen or need to cry
I could smile now
And turn away
Come over here so you can see me walk away
And celebrate the end of night
The end of night
The end of night

The end of night



Et deux autres titres pour découvrir son album :

No Freedom



Let Us Move On