samedi 30 avril 2016

Autopsie d'une descente en librairie


C'est paré des meilleures intentions du monde que je me suis lancée dans une descente du côté du quartier Saint-Michel cet après-midi.
Et tout cela partait d'un bon sentiment et d'un besoin fondé : trouver les quelques livres manquants pour le Prix des Lectrices 2016.
Et aussi trouver les deux petits guides qui me manquaient pour mon futur périple à Venise.
Et par la même occasion trouver un ou deux (ou trois ou quatre ...) romans qui me font envie.
Bref, il me faut parler d'autopsie car c'est un quasi "crime" littéraire que j'ai commis cet après-midi, ça pour m'être lâchée je me suis lâchée !


Tout a commencé au petit Boulinier où je suis ressortie avec 2 livres absolument non prévus mais qui m'ont intéressée :
- "L'enfant du Danube" de János Székely afin de continuer ma découverte de la littérature Hongroise
- "L'héritage Ferramonti" de Gaetano Carlo Chelli, apparemment une oeuvre importante à son époque de la littérature Italienne et dont aujourd'hui c'est surtout le film qui en a été tiré qui est resté.


Mes pas m'ont ensuite tout naturellement amenée vers Boulinier où j'ai trouvé trois livres figurant sur ma liste :
- "Éloge des femmes mûres" de Stephen Vizinczey recommandé par un collègue de travail
- "Ronde de nuit" de Sarah Waters, l'époque et l'histoire m'intéressent particulièrement
- "Melnitz" de Charles Lewinsky pour la fresque d'une famille Juive Suisse sur cinq générations (mon choix s'est en partie porté sur ce livre en raison de mon voyage à venir en Pologne)
Et deux "extras" :
- "Jours d'orage" de Kressmann Taylor dont j'ai adoré l'impitoyable "Inconnu à cette adresse"
- "Un instant d'éternité" d'E. M Forster (parce que Forster tout simplement)

Et ensuite je suis montée à Gibert Joseph, et ce fut le drame.


Partie "voyages" je suis repartie avec le Cartoville de Venise et les itinéraires avec Corto Maltese (testé et approuvé à Rome et à Florence), en prévision du voyage dans la Sérénissime en juin.
J'ai profité de trouver des guides récents en occasion pour me munir de Barcelone, une ville que je compte bien découvrir prochainement, et Naples/Pompéi/la Côte Amalfitaine car je me tâte beaucoup pour y retourner l'an prochain.


La dernière fois je n'avais pas trouvé "Carol" de Patricia Highsmith en occasion, cette fois-ci ce fut le cas, j'ai certes pris le livre mais je trouve son prix exagéré (5 euros, d'occasion) vu l'état de la couverture (mais j'avais très très envie de le lire ... .
Ayant particulièrement aimé ma découverte de Patricia Highsmith avec "L'inconnu du Nord Express" j'ai également pris "Ceux qui prennent le large", non prévu à l'origine mais dont la quatrième de couverture m'a plu.


La raison première de cette descente était de trouver les livres manquants pour le Prix des Lectrices 2016, j'ai trouvé mon bonheur avec "Par un matin d'automne" de Robert Goddard (classé dans les romans policiers, un choix un peu particulier) et "Simple" de Marie-Aude Murail (avec un lapin sur la couverture deviner qui a bien pu proposer ce livre ... donc celui-ci je dirai que c'est en partie la faute de LiliGalipette).


Pinpin est ravi de sa future lecture à venir


Partant prochainement en Pologne et plus précisément à Cracovie, j'ai très envie de découvrir la littérature  Polonaise Juive, je suis donc repartie avec deux romans issus de la littérature Yiddish (il s'agit de deux frères dont l'un fut Prix Nobel de Littérature) :
- "La famille Karnovski" d'Israël Joshua Singer
- "Shosha" d'Isaac Bashevis Singer


Encore une fois c'est la faute à LiliGalipette, j'avais repéré l'auteur Norvégien Tarjei Vesaas sur son blog, je suis donc repartie avec "Palais de glace".
Côté littérature Italienne j'avais noté "Le jardin des Finzi-Contini" de Giorgio Bassani, je ne voulais pas forcément le prendre mais finalement il y avait beaucoup d'occasions donc emballer c'est pesé.


Là j'avoue j'ai craqué, je suis allée faire un petit tour juste comme ça au rayon histoire, des fois qu'il y aurait en occasion le fameux livre sur Herculanum dont je rêve (notez que même en occasion il coûte une belle somme et qu'il est plutôt très rare à dénicher, si vous cherchez de quoi je parle c'est celui-là)


Il n'y avait donc pas le fameux livre sur Herculanum, par contre il y en avait un sur Pompéi (j'imagine que certaines personnes sourient derrière leur écran en me lisant, voire même rigolent en voyant le thème du livre), non seulement le prix était intéressant (ça n'est pas non plus 5 euros, on parle d'un livre d'histoire) mais la qualité était au rendez-vous, j'ai donc pris ce "Pompéi" de William Van Andriga, professeur d'histoire Romaine à l'université de Lille III et l'un des spécialistes de Pompéi.

J'ai quasiment fait un full score de ma liste de départ, mais autant dire qu'avec tout cette littérature (et certains sont de beaux pavés même si ça ne se voit pas forcément à l'image) je ne suis pas prête de remettre les pieds du côté de Saint-Michel avant un bon moment.

Il sera bien temps de profiter du 1er mai demain pour faire de la place sur les rayonnages de la bibliothèque pour ces nouveaux venus.

L'extraordinaire voyage de Sabrina de Pamela Lyndon Travers


Voici l’histoire de Sabrina Lind, 11 ans. Lorsque la Seconde Guerre mondiale atteint son petit village paisible du Sussex, Sabrina et son jeune frère sont envoyés par leurs parents chez leur tante en Amérique. Débute alors une longue traversée en bateau. En écrivant son journal, Sabrina va la vivre comme une grande aventure. L’imaginaire de l’enfance l’emportera-t-il sur les épreuves imposées par les adultes ? (Zethel)

Sabrina Lind a onze ans, c'est une petite fille Anglaise qui vit tranquillement dans son village de Thornfield dans le Sussez avec son père, sa mère, son petit frère, ses amis et ceux de ses parents, notamment l'excentrique mais attachante Pel.
Mais pour Sabrina, il n'y a pas de "supercalifragilisticexpialidocious", la Seconde Guerre Mondiale a commencé depuis plusieurs mois et atteint désormais la Grande-Bretagne et son village, c'est pourquoi ses parents décident de l'envoyer elle et son frère chez leur tante en Amérique.
Avec Sabrina et son frère partent aussi Pel et son bébé, pour Sabrina c'est alors une grande aventure qui commence et qu'elle va coucher dans son journal intime.

Bien entendu, je connais Pamela Lyndon Travers de nom, elle est la célèbre auteur de la non moins célèbre Mary Poppins, pourtant c'est la première fois que je me décide à la lire et je ne le regrette absolument pas.
Ce roman publié pour la première fois en 1941 et tiré d'une histoire vraie était jusqu'à présent inédit en France, voilà une erreur de réparée.
Cette histoire est très touchante, d'abord parce qu'elle s'inscrit dans un contexte historique difficile : la Seconde Guerre Mondiale, mais aussi parce que le personnage de la jeune Sabrina se met dès les premiers mots le lecteur dans sa poche en le touchant droit au coeur.
Dans son journal, elle ne fait pas que relater sa traversée, elle y parle aussi de ses angoisses, celles qui agitent les enfants de son âge, décuplées ici par la guerre, en abordant notamment la perception qu'a un enfant de son âge de l'espace dans lequel il évolue et du monde extérieur qu'il ne connaît pas jusqu'à présent et qu'il va devoir découvrir en laissant derrière lui le confort de son quotidien et la routine de sa vie : "On a l'impression qu'aucun endroit n'existe vraiment à moins qu'on y soit. Mais en fait si, parce que quand on s'en va, et qu'ensuite on revient, l'endroit est toujours là et a vécu sa propre vie en notre absence.".
C'est écrit comme un enfant de onze ans et c'est sans doute la grande force de ce récit, ce n'est pas mièvre mais c'est sincère et un lecteur plus âgé pourra y retrouver les sensations qu'il a connues lorsque enfant il a pris conscience du monde qui existait et vivait autour de lui.
Sabrina est un personnage attachant, que le lecteur prend grand plaisir à voir évoluer.
Face aux événements, Sabrina va devoir apprendre à s'adapter, à devenir une grande sœur en calmant les angoisses de son frère, elle va aussi découvrir une partie de la famille jusque-là inconnue et s'adapter à un pays qui est quelque peu différent de la Grande-Bretagne.
La tante Harriet et l'oncle George sont aussi des personnages bienveillants, n'hésitant pas à cacher la vérité à Sabrina et à James et faisant tout leur possible pour égayer la vie des deux jeunes enfants.
J'ai également ressenti une tendresse toute particulière à l'égard du personnage de Pel, cette jeune femme est très touchante et sous ses airs maladroits elle se révèle également un solide soutien pour Sabrina et son frère et n'hésite pas à traiter Sabrina comme une quasi adulte en lui inculquant la sagesse que la vie lui a appris : "Nous devons accepter ce qui nous arrive, Sabrina. Les bonnes choses, comme les mauvaises. Ne rien refuser. C'est la seule façon de vivre.".
Ce récit est à la fois doux et triste, empreint d'une certaine mélancolie de l'absence de la famille et du mal du pays, et il fait mouche dans le cœur du lecteur.
Les illustrations de Gertrude Hermes sont très belles et illustrent merveilleusement le récit.
J'ai découvert par la même occasion la maison d'édition Zethel et ce fut une belle découverte.

"L'extraordinaire voyage de Sabrina" de Pamela Lyndon Travers est un récit tendre et émouvant qui ravira sans nul doute petits et grands.

Je remercie Zethel et Babelio pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une opération Masse Critique.

mardi 26 avril 2016

Top Ten Tuesday #150


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani, puis désormais par Froggy.

Les 10 livres que ont marqué votre enfance/jeunesse

1) "François le bossu" de la Comtesse de Ségur
2) "Les malheurs de Sophie", "Les petites filles modèles", "Les vacances" de la Comtesse de Ségur
3) La série "Alice" de Caroline Quine
4) La série "Les six compagnons" de Paul-Jacques Bonzon
5) "Les quatre filles du Docteur March" de Louisa May Alcott
6) "Le club des cinq" d'Enid Blyton
7) "Les contes de mon moulin" d'Alphonse Daudet
8) "Ivanhoé" de Walter Scott
9) La trilogie "Flicka" de Mary O'Hara
10) Le journal de Mickey

samedi 23 avril 2016

A couteaux tirés d'Olen Steinhauer


Henry se rend en Californie et revoit à cette occasion Celia, son ancienne maîtresse. Tous deux ont été agents secrets, à Vienne, et ne se sont pas revus depuis l'attentat terroriste qui a coûté la vie à cent vingt personnes dans un avion, cinq ans plus tôt. Celia a quitté la CIA et a fondé une famille. Malgré les sentiments qu'il éprouve encore, Henry a aujourd'hui une mission à remplir : découvrir ce qu'elle sait sur cette terrible journée où tout a basculé. (Presses de la Cité)

Il y a un peu plus de cinq ans, Henry Pelham et Celia Favreau travaillaient ensemble à Vienne en tant qu'agents secrets, et étaient également amants.
Puis il y a eu un attentat terroriste qui a coûté la vie à cent vingt personnes dans un avion, Celia a quitté la CIA, a fondé une famille et vit désormais aux Etats-Unis tandis que Henry a continué d'exercer son métier.
Aujourd'hui, Henry vient visiter Celia en partie avec l'espoir de ranimer la flamme entre eux mais surtout pour accomplir sa mission : obtenir des réponses et savoir ce qui s'est exactement passé ce jour fatidique où cent vingt personnes ont perdu la vie.

Cette histoire est un huis-clos se déroulant sur un laps de temps assez court, un dîner entre Celia et Henry, mais va permettre alternativement à chaque personnage d'évoquer le passé et de se replonger un peu plus de cinq ans en arrière à Vienne en livrant leurs points de vue et leurs impressions sur les événements qui s'y sont déroulés.
Celia est une femme différente, elle est aujourd'hui mariée et mère de deux enfants et pourtant elle accepte de revoir son ancien amant : "Je suis assise en face du meilleur amant que j'aie jamais eu et nous discutons de choses qui n'existent plus pour moi. C'est un peu comme si je parlais de mes rêves.".
A-t-elle véritablement changé et a-t-elle baissé sa garde ou bien joue-t-elle un double jeu comme Henry, qui est venu avec une idée bien précise derrière la tête concernant Celia : "Je pense à ce que je m'apprête à lui faire, et je me demande si je serai capable de vivre avec ce poids sur les épaules, alors même que toute mon entreprise a pour but d'assurer ma survie, justement." ?
L'intrigue de ce roman est très prenante et fonctionne bien, une fois commencé il est difficile de le lâcher, d'autant que l'histoire se déroule toute seule et que l'alternance entre les points de vue de Henry et de Celia offre au lecteur un double éclairage sur les événements passés à Vienne et la perception de chacun.
Si Henry apparaît comme un homme perdu dans le sens où sa vie se résume à son travail d'agent secret, Celia elle a su évoluer sans perdre les réflexes de sa vie passée, ce qui l'amène d'ailleurs à s'interroger sur l'affectation que son travail passé a sur sa vie actuelle : "Est-ce que cette spirale infernale du pouvoir risque de nous jouer des tours, à nous aussi ?".
Peut-être est-ce parce que je suis une femme j'ai ressenti plus d'empathie pour le personnage de Celia et l'évolution qu'elle a connue, le personnage de Henry a su moins me toucher, en tout cas je comprenais la démarche que Celia a pu avoir à l'époque de Vienne et le choix radical qu'elle a fait de changer de vie.
Difficile de vous en dire plus sans dévoiler l'histoire mais il y a de nombreux rebondissements et je ne m'attendais pas tout à fait à cette fin, preuve que l'auteur a su endormir ma méfiance sur certains aspects de l'histoire pour me faire partir sur une autre piste.
Je ne connaissais pas Olen Steinhauer mais j'ai beaucoup apprécié cette lecture, l'intrigue policière fonctionne et il a distillé beaucoup de suspens dans son scénario.
D'ailleurs j'imagine assez bien cette histoire en version cinématographique.
Mon léger regret est que j'ai été attirée par ce livre car une partie de l'intrigue se passe à Vienne or au final je n'ai pas vraiment retrouvé cette ville que je connais, les personnages ne font que citer des noms de rues ou de boîtes de nuit, je m'attendais à ce que des monuments ou des lieux emblématiques soient évoqués, à part la Gloriette dans le parc du château de Schönbrunn je n'ai pas été servie pour des retrouvailles littéraires avec Vienne.
Enfin, c'est un coïncidence avec le contexte actuel mais c'est le deuxième roman que je lis en l'espace de quelques mois où il est question d'un attentat terroriste majeur, je préfère bien entendu que ce genre d'événement reste du domaine de la fiction plutôt que du réel mais je trouve toujours intéressant de lire ce type d'histoire pour voir la façon dont l'auteur le traite.

"A couteaux tirés" porte bien son nom car d'un simple dîner de retrouvailles ce roman se transforme en joutes verbales entre les deux protagonistes jusqu'à ce que la vérité éclate, ne pas hésiter à consommer si vous êtes curieux de voir les coulisses des services secrets et de la lutte antiterroriste.  

Je remercie les Editions Presses de la Cité et Babelio et pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une opération Masse Critique.

mardi 19 avril 2016

Top Ten Tuesday #149


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani, puis désormais par Froggy.

Les 10 livres que vous trouvez trop médiatisés

1) Ceux de Guillaume Musso
2) Ceux de Marc Lévy
3) "La vérité sur l'affaire Harry Quebert" de Joël Dicker
4) "Da Vinci Code" de Dan Brown
5) "Soumission" de Michel Houellebecq
6) "L'extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea" de Romain Puertolas
7) "Charlotte" de David Foenkinos
8) "Le trône de fer" de Georges R. R. Martin
9) La trilogie Grey d'E. L James
10) Les nouvelles parutions de Harlan Coben, moins percutantes que les précédentes

jeudi 14 avril 2016

Room de Lenny Abrahamson

     
     

Jack, 5 ans, vit seul avec sa mère, Ma. Elle lui apprend à jouer, à rire et à comprendre le monde qui l’entoure. Un monde qui commence et s’arrête aux murs de leur chambre, où ils sont retenus prisonniers, le seul endroit que Jack ait jamais connu. L’amour de Ma pour Jack la pousse à tout risquer pour offrir à son fils une chance de s’échapper et de découvrir l’extérieur, une aventure à laquelle il n’était pas préparé. (AlloCiné)


C'est un grand jour pour Jack (Jacob Tremblay), il vient d'avoir cinq ans.
Avec sa maman, appelée Ma (de son vrai nom Joy, Brie Larson), il regarde Madame Télé pour les dessins animés, il mange sur Madame Table, il fait du sport en faisant des allers-retours d'un mur à l'autre, et ensemble ils confectionnent un gâteau d'anniversaire, mais sans bougie.
Car Jack et Ma n'ont pas une vie ordinaire, ils vivent dans la Pièce, où il y a une petite cuisinière, une table, un lit, une armoire, une baignoire et une fenêtre très loin sur le toit, séquestrée dedans pour Ma depuis plusieurs années tandis que Jack n'a toujours connu que cette Pièce.
Et parfois la nuit Jack doit dormir dans le placard car Old Nick (aka Grand Méchant Nick en Français, Sean Bridgers) vient rendre visite à Ma.
Ma a construit un univers à Jack, sans lui parler de ce qui existe réellement à l'extérieur, mais aujourd'hui elle décide de dé-construire tout l'univers qu'elle a créé pour son petit garçon car elle a décidé qu'il était temps pour eux de se délivrer et de retrouver une famille et la vie telle qu'elle doit être.
Ma va donc minutieusement préparer Jack à la grande aventure de sa vie du haut de ses cinq ans : aller à l’extérieur de la Pièce et découvrir un monde auquel il ne s'attendait pas.


La première partie du film est assez angoissante pour ne pas dire claustrophobique.
Elle se déroule dans une seule et même pièce que le spectateur a l'impression, comme Jack, de voir relativement grande.
On découvrira par la suite qu'il n'en est rien, mais pour l'instant tout semble assez bien aménagé.
La vie de Ma et Jack est précise et rythmée de moments qui reviennent quotidiennement, ainsi pendant une bonne partie le film prend le temps de poser ces bases et de laisser le spectateur s'habituer.
Old Nick est un personnage que le spectateur voit finalement peu, la caméra est concentrée autour de Ma et Jack.
J'aime assez ce parti pris du réalisateur, Old Nick est un monstre et le fait de ne pas le voir frontalement renforce encore plus cet aspect.
Là où tout s'accélère c'est lorsque Ma décide qu'il est temps pour eux de s'enfuir, elle agit uniquement poussée par l'amour qu'elle ressent pour son fils et a su tirer des leçons de ses erreurs passées dans ses tentatives avortées de fuite.
A partir de ce moment la mère et le fils ne sont plus complices comme auparavant, Ma pousse Jack dans ses retranchements, elle saborde tout ce qu'elle a construit pour lui tandis que Jack réagit assez mal et n'hésite pas à piquer quelques colères envers sa mère, plutôt normal pour un enfant de cinq ans.
Vient enfin le moment de l'évasion de Jack et de sa découverte de l'extérieur et j'avoue que c'est à mes yeux le passage le plus abouti et réussi du film : il y a une tension forte, j'ai vibré avec Jack, j'étais accrochée à l'accoudoir du fauteuil tant je craignais qu'il ne réussisse pas.


C'est alors que se met en place la deuxième partie du film, celle du retour dans le monde extérieur et des retrouvailles de Joy avec sa mère (Joan Allen) désormais séparée de son père et ayant refait sa vie avec Leo, une partie moins bien réussie que la première.
Pour cette partie le réalisateur a changé sa mise en scène et elle s'avère assez banale, en tout cas moins précise et travaillée que dans la première.
Si l'on voit les difficultés de Ma et de Jack à se ré-adapter, je trouve néanmoins que cet aspect est trop survolé pour Ma.
Certes, elle va vivre des moments difficiles, mais je trouve que cela aurait pu être approfondi beaucoup plus (ayant lu le roman par la suite je trouve cet aspect beaucoup mieux traité dans celui-ci que dans le film).
Contrairement à sa mère, Jack va finir par s'habituer à sa nouvelle vie et à sa nouvelle famille, je trouve les relations qu'il entretient avec sa grand-mère et le compagnon de celle-ci tout à fait touchantes.
La réaction du père de Joy est également intéressante car il refuse de regarder son petit-fils, il est dégoûté par cet enfant et cela correspond plutôt bien au genre de réaction que l'entourage pourrait avoir dans de telles circonstances.
Si Brie Larson a passé la première partie du film sans maquillage et de façon plutôt négligée, elle change petit à petit dans cette seconde partie et finit par retrouver une partie de ses réflexes d'avant.
Il y a quelques belles scènes pleines d'émotions avec Jack mais moins que dans la première partie.
Car l'actrice qui est complètement formidable ici est Joan Allen, elle campe à merveille le rôle de cette grand-mère qui retrouve sa fille et découvre son petit-fils, et ce sont les scènes entre ces deux-là qui sont à mes yeux les plus touchantes.
Jacob Tremblay est lui aussi un petit garçon formidable car sa prestation est tout à fait remarquable du début à la fin, et c'est à mon sens lui la véritable révélation du film.
Car il faut maintenant que je sois honnête, même si Brie Larson a un jeu maîtrisé, et ce fut pour moi une belle découverte et révélation cinématographique, elle ne méritait pas selon moi d'avoir un Oscar pour ce rôle.
Personnellement j'ai été plus sensible à la prestation de Cate Blanchett dans "Carol" mais je reconnais que Brie Larson a du talent et qu'il n'était pas facile de tenir aussi justement un tel rôle et de faire ressortir à ce point tout ce que pousse à faire l'amour maternel.
Je ne suis peut-être pas très objective sur ce coup-là, mais en tout état de cause "Room" est un film aussi bouleversant que peut l'être le roman dont il est tiré, son auteur, Emma Donoghue, ayant d'ailleurs participé au scénario du film.


"Room" de Lenny Abrahamson est un film à la fois angoissant et humain, très touchant par bien des aspects et qui mérite sans nul doute d'être vu.


     
     

     
     

mardi 12 avril 2016

Top Ten Tuesday #148


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani, puis désormais par Froggy.

Les 10 livres que vous offririez à un(e) ami(e)

Je vais proposer 5 livres "anciens" et 5 récents.

1) "Jane Eyre" de Charlotte Brontë
2) "Rebecca" de Daphné du Maurier
3) "La mort n'est pas une fin" d'Agatha Christie
4) "L'inconnu du Nord Express" de Patricia Highsmith
5) "Transperceneige" de Jacques Lob et Jean-Marc Rochette
6) "Birdbox" de Josh Malerman
7) "Le livre de Dina" de Wassmo
8) "Pardonnable, impardonnable" de Valérie Tong Cuong
9) "Prendre Gloria" de Marie Neuser
10) "Suite française" d'Irène Némirovky

lundi 11 avril 2016

Room d'Emma Donoghue


Sur le point de fêter ses cinq ans, Jack a les préoccupations des enfants de son âge. Ou presque. Il ne pense qu’à jouer et à essayer de comprendre le monde qui l’entoure, comptant sur sa mère pour répondre à ses questions. Celle-ci occupe dans sa vie une place immense, d’autant plus qu’il vit seul avec elle dans la même pièce, depuis sa naissance. Il y a bien les visites du Grand Méchant Nick, mais la mère fait tout pour éviter à Jack le moindre contact avec lui. Jusqu’au jour où elle comprend qu’elle ne peut pas continuer à entretenir l’illusion d’une vie ordinaire. Elle va alors tout risquer pour permettre à Jack de s’enfuir. (Le Livre de Poche)

Jack vit seul avec sa mère, dans l'univers clos d'une pièce qui est pour lui le monde.
Dans cette Pièce, il y a Madame Télé, Monsieur Lit, Madame Table, autant d'objets qui constituent son quotidien, d'autant que pour lui, ce qu'il voit dans Madame Télé est la seule et unique vérité.
C'est en tout cas ce que sa mère lui a toujours dit, mais aujourd'hui Jack a cinq ans et sa mère décide qu'il est temps de s'enfuir de cet endroit où elle est séquestrée depuis plusieurs années : "Je t'ai fait naître ici et ce soir je vais t'en faire sortir.".

Le récit est raconté du regard de Jack, cinq ans, qui va voir son univers bousculé.
Pendant cinq années il n'aura vécu que dans cette pièce, avec sa mère, sans contact avec le monde extérieur, hormis avec Grand Méchant Nick et encore, sa mère prend soin de le cacher à chacune des visites de ce sinistre homme.
Et puis en quelques jours sa mère met au point un plan d'évasion, consistant à faire sortir Jack de la pièce afin qu'il puisse alerter la police et que celle-ci vienne la délivrer, et qu'enfin elle retrouve sa famille et qu'elle puisse mener une vie normale avec son fils.
Mais pour cela, elle va devoir déconstruire ce qu'elle a appris à Jack, en très peu de temps, alors que paradoxalement elle a mis si longtemps à partir l'illusion dans laquelle elle a fait vivre son fils.
Je ne lui jette pas la pierre, absolument pas, car ce personnage est durant tout le récit une mère qui aime son fils et dont toutes les actions sont guidées dans le seul but de le protéger.
Il suffit de voir qu'elle le cache à Grand Méchant Nick, qu'elle refuse que celui-ci ne fasse que poser ses yeux sur l'enfant.
Grand Méchant Nick est non seulement l'homme qui l'a enlevée par ruse, séquestrée et régulièrement violée, c'est aussi la personne qu'elle craint le plus car il peut être violent et ses représailles laissent des traces aussi bien physiques que morales : "Rien ne fait peur à Maman. Sauf Grand Méchant Nick, peut-être.".
Difficile de ne pas être touchée par ce récit, j'ai beaucoup aimé la partie se passant à l'intérieur de la pièce, en huis-clos entre la mère et le fils, mais j'ai encore plus apprécié celle racontant l'après, la ré-adaptation à une vie "normale" et la découverte par Jack du monde et de l'univers dont il ne voyait que des bribes à travers Madame Télé, le point culminant de ce récit étant bien entendu la fuite de Jack, c'est un passage que j'ai lu d'une seule traite tant j'étais prise par l'action et l'angoisse qui s'en dégage.
Pour écrire cette fiction, Emma Donoghue s'est inspirée de faits réels : l'enlèvement de Jaycee Lee Dugard, celui d'Elizabeth Smart aux Etats-Unis, mais difficile de ne pas penser aussi aux cas ayant eu lieu en Europe : Elizabeth Fritzl, Natascha Kampusch.
Si l'on regarde dans l'univers du conte, Grand Méchant Nick pourrait être assimilé à l'ogre, il n'a qu'un rôle secondaire dans le récit et il n'est jamais mis en avant, ce qui contribue d'autant plus à lui donner une dimension de croquemitaine.
La première partie du récit est intéressante car elle permet de placer les personnages de la mère et du fils et de les voir interagir dans leur quotidien.
Si la mère aime son fils plus que tout au monde, et quand on sait les conditions de sa conception cela la rend à mes yeux d'autant plus admirable (l'amour maternel est un sentiment que j'ai du mal à percevoir ou à cerner de façon générale), je dois reconnaître que Jack n'est pas toujours un petit garçon très gentil, il se comporte parfois en tyran vis-à-vis de sa mère et pique de belles colères.
La seconde est pour moi encore plus importante car elle s'intéresse à la ré-introduction dans la vie de tous les jours de ces deux êtres qui ont vécu pendant plusieurs années pour la mère hors du temps et pour Jack dans un univers créé de toutes pièces.
Si je reproche au film de ne pas avoir assez creusé cette partie, je dois reconnaître que sur ce point le roman m'a donné entière satisfaction.
Finalement, Jack s'adapte relativement vite et bien à la vie dans le monde tel que nous le connaissons : "Quand j'avais quatre ans, je croyais que tout dans Madame Télé existait juste à la télé; après j'ai eu cinq ans et Maman m'a dit qu'en vrai plein d'images montraient vraiment des choses et que tout le Dehors existait pour de vrai. Sauf que maintenant, je suis dans le Dehors mais il y en a plein des pas vraiment vrais.", il n'en est pas de même pour sa mère, et découvre sa grand-mère, un personnage remarquable, ainsi que l'homme qui partage désormais sa vie, et plus furtivement son grand-père qui a du mal à accepter cet enfant né d'une relation non consentie et de séquestration.
La seule chose qui m'a gênée à plusieurs reprises dans ce roman c'est la narration faite du point de vue de Jack, cinq ans.
C'est puéril par moment, plein de fautes de grammaire, normal me direz-vous venant de la part d'un enfant de cinq ans, mais voilà, même si cela a été fait afin d'atténuer l'horreur du récit par moment j'aurai aimé un texte mieux écrit d'une certaine façon.
Car je suis bien en peine de vous parler du style de l'auteur, elle a fait un travail d'écriture mais je ne peux pas dire autre chose de plus.
Il ne me reste plus qu'à lire une autre de ses œuvres traduite en Français pour cela.

"Room" d'Emma Donoghue est un beau roman plein d'émotions qui touche par la douceur qui s'en dégage alors que l'histoire qu'il raconte est d'une noirceur profonde, preuve, s'il en était besoin, que le bonheur trouve toujours son chemin même dans le malheur le plus profond.

Livre lu dans le cadre du Club des Lectrices

dimanche 10 avril 2016

Médecin de campagne de Thomas Lilti

     
     

Tous les habitants, dans ce coin de campagne, peuvent compter sur Jean-Pierre, le médecin qui les ausculte, les soigne et les rassure jour et nuit, 7 jours sur 7. Malade à son tour, Jean-Pierre voit débarquer Nathalie, médecin depuis peu, venue de l’hôpital pour le seconder. Mais parviendra-t-elle à s’adapter à cette nouvelle vie et à remplacer celui qui se croyait… irremplaçable ? (AlloCiné)


Le médecin de campagne, c'est Jean-Pierre Werner (François Cluzet), celui qui ne compte ni les kilomètres ni les heures pour aller au plus près des gens, les soigner, les écouter, sept jours sur sept et sans doute trois cent soixante cinq jours par an.
Mais voilà, Jean-Pierre est malade, gravement, et son médecin l'encourage vivement à lever le pied, et pour cela lui envoie Nathalie Delezia (Marianne Denicourt), ancienne infirmière venant de terminer ses études de médecine.
Va-t-elle s'adapter à cette vie ? Va-t-elle trouver sa place auprès d'un Jean-Pierre qui se croit irremplaçable ?


Je n'ai pas vu la précédente oeuvre de Thomas Lilti "Hippocrate", une histoire se situant dans le domaine hospitalier.
Apparemment c'est un milieu qui intéresse fortement le réalisateur, et qu'il connaît plutôt bien.
Et il faut dire ce qui est, son "Médecin de campagne" est un film oscillant entre documentaire et fiction qui livre un témoignage assez réaliste sur le quotidien d'un médecin généraliste à la campagne : petits ou gros bobos, dépannages, déplacements à toute heure du jour et de la nuit, un cabinet qui ne désemplit pas.
Ici ce n'est pas non plus la campagne profonde car l'Ile-de-France est proche mais le film donne un bon aperçu de ce que cela peut-être en rase campagne.
Il donne aussi un bon aperçu de tout ce qu'il faut pour être médecin : avoir simplement une tête bien faite ne suffit pas, il faut surtout aimer les gens, c'est en tout cas ce qui se dégage de Jean-Pierre et Nathalie, deux personnes ayant eu des parcours différents.
J'ai apprécié ce film car il s'en dégage beaucoup d'humanité, à la fois des médecins envers leurs patients mais aussi des médecins entre eux, et de toutes les personnes qui croisent leur route en général.
Le rôle de Jean-Pierre va très bien à François Cluzet, quant à Marianne Denicourt c'est avec plaisir que je l'ai vue à l'écran, d'autant plus que c'est une actrice dont je ne suis le parcours que de loin.
Il y a toute une galerie assez savoureuse de personnages, j'ai apprécié de pouvoir les suivre tout au long du film ainsi que le découpage choisi par le réalisateur dans la première partie, afin de montrer le travail et les déplacements effectués par Jean-Pierre pour aller sans cesse à la rencontre des autres.
A propos de rencontre, celle quelque peu forcée entre Nathalie et Jean-Pierre est une forme d'entente professionnelle et de croisement de deux solitudes.
Car malgré le fait que Jean-Pierre ne cesse de voir des gens à longueur de journée il est quand même relativement seul, son fils étant parti de la maison pour faire des études à Paris et ne revenant que de temps en temps; quant à Nathalie on devine que c'est une femme seule sans enfant qui a sans doute connu au moins une relation amoureuse désastreuse, c'est en tout cas ce qu'elle dit à demi-mot à une patiente en lui conseillant de laisser tomber le sale bonhomme qui ne cesse de lui dire qu'il veut avoir un enfant pour la faire avorter dès qu'elle est enceinte.
Je reprocherai à ce film sa fin un peu trop expédiée, dans le sens où un certain temps a passé sans que cela se ressente pour autant à l'écran.
Mais Thomas Lilti a choisi de présenter une histoire plutôt optimiste du début à la fin contenant beaucoup d'humanité, une bouffée d'air frais dans le contexte actuel, alors je lui pardonne sa fin quelque peu expéditive.


Faut-il courir voir "Médecin de campagne" au cinéma ?
Si vous êtes poursuivi par des jards et que vous n'arrivez pas à les humilier (en leur mettant le bec dans le cul) oui; en fait même si ce n'est pas le cas je vous invite à y aller, ne serait-ce que pour l'humanité qui s'en dégage.



samedi 9 avril 2016

Notre mère la guerre - Tome 4 : Requiem de Maël et Kris


En septembre 1917, remis de ses blessures, le lieutenant Vialatte apprend deux nouvelles d’importance : Eva, l’amour de sa vie, travaille comme interprète à la Croix-Rouge. Par ses fonctions, elle est en contact avec les camps de prisonniers français en Allemagne. Et c’est par elle que Vialatte découvre que Peyrac, porté disparu en 1915, a été fait prisonnier et qu’il est bien vivant. Vialatte, avec l’aide de Janvier, reprend donc son enquête à zéro... (Futuropolis)

Alors que tout le monde, y compris le lecteur, pensait l'enquête au point mort, un événement vient tout relancer : le lieutenant Vialatte apprend par le biais du capitaine Janvier qu'Eva, le femme qu'il aime et de nationalité Autrichienne, travaille comme interprète à la Croix-Rouge dans les camps de prisonniers Français en Allemagne et que là-bas elle y a retrouvé Peyrac, porté disparu depuis 1915.
Entre cette nouvelle et les découvertes de Vialatte et Janvier sur les traces de Peyrac autant dire que Vialatte envisage son enquête sous un angle d'approche différent et surtout étonnant : "Ce serait énorme, évidemment. Et ça poserait bien plus de questions que ça n'apporterait de réponses. Mais enfin, rien ne correspond à rien dans toute cette histoire, et je n'arrive absolument pas à relier les différents éléments.".

Certes, il y a ici la révélation finale, la réponse à la question qui taraude tous le esprits depuis trois tomes désormais : "mais qui a bien pu assassiner ces femmes et les laisser en première ligne ?", mais il y a surtout un homme que cette guerre a complètement changé : "La guerre a grignoté l'homme que j'étais.", et qui aujourd'hui à l'heure de son agonie se confesse sur cette enquête qui l'aura occupé durant quatre années.
Ne comptez pas sur moi pour vous le dire, mais simplement qu'il n'y a pas que la guerre qui peut rendre fou un homme.
Vialatte est un homme changé, si le lecteur comprend qu'il a repris par la suite une vie à peu près normale cette guerre l'a profondément bouleversé : "Pour ceux qu'elle touche un jour, la guerre continue toujours. Elle ne s'achève qu'avec notre mort.", c'est pourquoi il attend avec une forme d'impatience l'heure de sa délivrance.
Je n'irai pas jusqu'à dire que la révélation finale m'a surprise, disons que le mobile un peu plus, d'autant que les auteurs réservent encore au lecteur une petite révélation qui fait son effet.
Il aura fallu les quatre années d'une guerre pour résoudre le meurtre des femmes, mais il faudra bien plus longtemps pour que les hommes l'ayant vécu retrouvent un semblant de vie normale : "Après le vacarme des cloches et des coups de clairons, alors ce fut le silence. Comme un grand étonnement qui recouvrirait la terre et le ciel tout entiers. Un silence immense. Un silence d'enterrement.".
La guerre de 14-18 fut particulièrement meurtrière, c'est un aspect qui est bien montré dans cette bande dessinée, à la travers le prisme des soldats mais aussi de la fiction créée avec les assassinats de ces femmes : cette guerre n'a épargné personne, a été totale et a vu apparaître de nouvelles armes destructrices : les avions, les chars, les lance-flammes et les gaz.
Le scénario de cette bande dessinée est une réussite sur la toute la ligne, j'ai également beaucoup apprécié les dessins, particulièrement la représentation de la guerre et des champs de bataille, ainsi que la mise en couleur.
Je ne connaissais ni Maël ni Kris mais ce sont désormais deux noms de la bande dessinée que je retiens et dont j'ai envie de découvrir les autres travaux.

Avec ce "Requiem" la messe est dite et l'heure de pleurer les morts est venue.
Quelle formidable bande dessinée ayant pour trame de fond la guerre de 14-18 !

mardi 5 avril 2016

Top Ten Tuesday #147


Le Top Ten Tuesday (TTT) est un rendez-vous hebdomadaire dans lequel on liste notre top 10 selon le thème littéraire défini.

Ce rendez-vous a été créé initialement par The Broke and the Bookish et repris en français par Iani, puis désormais par Froggy.

Les 10 livres que vous aimeriez faire dédicacer

1) "Jane Eyre" de Charlotte Brontë
2) "Les hauts de Hurlevent" d'Emily Brontë
3) "Rebecca" de Daphné du Maurier
4) "Le livre de Dina" de  Herbjørg Wassmo
5) "L'épervier" de Patrice Pellerin
6) "Suite Française" d'Irène Némirovsky
7) "Le sursis" et "Le vol du corbeau" de Jean-Pierre Gibrat
8) "Aldebaran" de Léo
9) "Les passagers du vent" de François Bourgeon
10) "Les malheurs de Sophie", "Les petites filles modèles" et "Les vacances" de la Comtesse de Ségur

lundi 4 avril 2016

Notre mère la guerre - Tome 3 : Troisième complainte de Maël et Kris


À la fin du deuxième volume, les « gosses » de la section Peyrac sont suspectés par Vialatte et surtout le capitaine Janvier d’être les assassins des quatre jeunes femmes. Mais Raton, Surin, Jolicoeur, Jojo, Planchard et Le Goan succombent à une attaque des Allemands. Le caporal Peyrac, lui aussi, est porté disparu. Quand débute le troisième tome, nous sommes en mai 1917, vingt-sept mois plus tard. Le lieutenant Vialatte est versé dans les chars, en première ligne. Gravement blessé, il sera soigné à l’hôpital militaire du camp de Marly-le-Roi. À sa surprise, le désormais commandant Janvier vient lui rendre visite. « Vous vouliez rendre justice à ces malheureuses femmes et à ces gamins perdus ? Je vous en redonne le pouvoir », lui dit-il en substance. Vialatte, tout juste remis de ses blessures, reprend donc son enquête à zéro… (Futuropolis)

Nous sommes désormais en mai 1917, le lieutenant Vialatte a décidé de participer au combat et officie dans les chars, en première ligne.
Grièvement blessé, il est soigné dans un hôpital à l'arrière quand il voit débarquer, à sa plus grande surprise, le commandant Janvier.
Ce dernier ne le visite pas par politesse mais pour lui offrir la possibilité de dénouer l'enquête sur les meurtres de femmes dont les cadavres ont été laissés en première ligne.
Car non seulement Vialatte n'a eu que des soupçons sur les jeunes hommes du caporal Peyrac, ils ont d'ailleurs tous péri dans un assaut des Allemands et Payrac est porté disparu depuis plus de deux ans, mais sa précédente enquête n'a rien donné et aujourd'hui il est convaincu qu'il a soupçonné les mauvaises personnes : "Car plus j'y pense et plus je me dis que rien ne concorde dans cette histoire. Ils se sont battus sauvagement. Mais ça n'en faisait pas des tueurs pour autant.".
C'est donc reparti de plus belle, comme en 14 oserai-je dire, et Vialatte est cette fois-ci bien décidé à ce que la vérité éclate.

C'est un Vialatte nettement changé que j'ai retrouvé.
Non seulement il a franchi le pas et est désormais engagé officiellement dans les combats, mais en plus à un poste à risque mettant en oeuvre une technologie nouvelle : le char.
Pour cela, Vialatte a non seulement laissé derrière lui ses illusions, sa poésie et sa vision exaltée et patriotique de la guerre, mais aussi une femme, cette Éva que le lecteur voit auprès de lui depuis le début de son récit sous forme de confession tandis qu'il agonise : "La guerre a rejeté mon amour de l'autre côté du monde, dressant une infranchissable zone de non-vie entre Éva et moi. Et je l'ai laissée faire, partant de mon côté, les valises remplies par l'orgueil et le romantisme de mon éducation, toutes choses qui m'ont fait prendre le train de la guerre. Et rester au quai de la vie.".
Entre 1917 et la fin de la guerre beaucoup de choses se sont donc passées entre Vialatte et cette femme Autrichienne, c'est en tout cas ce que le lecteur pressent mais il va lui falloir être encore un peu patient pour connaître le dénouement.
Il n'y a pas que Vialatte qui a changé, les soldats en ont assez, ils veulent la paix et cesser de se battre : "C'est la guerre qu'ils nous disent ! Mais est-ce que c'est la guerre, nous, qu'on veut ?".
Et finalement Vialatte va avancer dans son enquête et faire une découverte des plus surprenantes.
Ce troisième tome contient selon moi la plus grosse surprise de ce récit, quelque chose auquel je ne m'attendais absolument pas et qui change la face de l'histoire.
Une nouvelle fois je salue la qualité de l'intrigue qui va ici de rebondissement en rebondissement, ainsi que le traitement psychologique des personnages.
Je n'irai pas jusqu'à dire que Vialatte est un personnage pour lequel on ressent une profonde empathie, mais il évolue tellement face aux événements que ce n'en est que plus intéressant de le suivre.
La mise en page est également importante avec, comme d'ordinaire, des doubles pages consacrées aux réflexions de Vialatte collées à des images montrant l'évolution de la guerre et la lassitude des soldats.
Le seul petit reproche que je ferai aux dessins va aux visages féminins que je trouve ma foi un peu trop taillés à la serpe et manquant pour le coup de féminité.
Cela passe sans problème avec les hommes mais pour ma part un peu moins avec les femmes.
Hormis cette remarque complètement personnelle j'ai une nouvelle fois grandement apprécié ma lecture et j'ai hâte de connaître le dénouement.

Courage soldats, la bénédiction est proche et l'heure de la délivrance a bientôt sonné, mais en attendant il en reste encore un peu avant de boucler et d'archiver le dossier de "Notre mère la guerre".

dimanche 3 avril 2016

Pardonnable, impardonnable de Valérie Tong Cuong


Un après-midi d'été, alors qu'il se promène à vélo sur une route de campagne, Milo, 12 ans, chute et se blesse grièvement. Ses parents et sa famille se précipitent à son chevet et tentent de trouver des explications. Le petit garçon était en effet censé réviser son cours d'histoire. (J'ai Lu)

C'est la fin de l'été, bientôt la rentrée, Milo est à vélo avec sa tante Marguerite quand il chute lourdement, se blesse grièvement et se retrouve ainsi à l'hôpital dans le coma : "Les cœurs tendres lâchent-ils plus facilement que les autres ?".
Fort heureusement, Milo se réveille mais commence pour lui une longue période de ré-apprentissage : parler, marcher, réfléchir, tandis qu'autour de lui sa famille composée par son père Lino, sa mère Céleste, sa grand-mère Jeanne et sa tante Marguerite vole en éclat, écrasée par le poids de secrets trop longtemps enfouis.
"Ce n'est pas la manière dont les choses arrivent qui compte, c'est la raison pour laquelle elles se produisent.", et sans doute que l'accident de Milo va permettre aux membres de cette famille d'arrêter de se taire, de se parler enfin et de recommencer à vivre, tout simplement.

Dans cette famille, Lino n'aime pas sa belle-sœur Marguerite, pour une raison dont il est le seul coupable,
Jeanne n'aime pas sa fille Marguerite pour une raison dont elle est seule coupable et qu'elle ne cessera de lui faire payer : "Mais moi, aurais-je dû t'aimer simplement parce que tu sortais de mon ventre ? Aurais-je dû t'aimer envers et contre tout, contre la trahison, l'abandon, le mensonge ? Contre le désespoir ? Est-ce que je ne méritais pas moi aussi qu'on me protège, qu'on me défende, qu'on me soutienne ? Qui peut fabriquer des sentiments à partir du néant ?", seuls Céleste et Milo aiment donc inconditionnellement Marguerite.
Pourtant, l'amour d'un être lie toute cette famille, celui de Milo, et si la situation du petit garçon ne s'améliore pas c'est l'équilibre de toute cette famille qui est remise en cause : "Milo doit redevenir Milo, ou nous perdrons tous beaucoup.".
"Pardonnable, impardonnable" est un livre qui traite du pardon, mais pas que.
En fait, je crois qu'il parle surtout de l'amour sous toutes ses formes : l'amour maternel, l'amour fraternel, l'amour familial, l'amour charnel.
Il y est beaucoup question de pardon, du sens réel de ce terme, car le dire est très facile mais le dire et le penser beaucoup moins.
Et aussi d'amour, celui de toute une famille pour Milo, celui de Céleste pour sa sœur Marguerite, pour son mari Lino, celui de Jeanne pour sa fille Céleste.
Et aussi de non-amour, particulièrement cette absence de sentiment que ressent Jeanne face à sa fille Marguerite.
Jeanne aurait voulu aimer sa deuxième fille, mais rien n'y a fait, elle ne l'aime pas, elle n'y arrive pas même en se forçant, et elle a laissé Céleste aimer à la place cette petite marguerite qui n'avait rien demandé ni rien fait à personne : "C'est toi qui a choisi ce prénom, Marguerite, moi je me fichais bien qu'elle s'appelle Nadège, Coralie ou n'importe quoi d'autre, mais tu as choisi Marguerite et j'ai pensé : je t'aime un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, PAS DU TOUT.".
L'absence d'amour d'une mère envers son enfant, voilà l'un des derniers tabous de la société qui n'est pas encore tombé et qu'il serait temps de faire chuter.
Oui, le fait de poser un nouveau né sur le sein de sa mère ne provoque pas toujours le sentiment d'amour que cela devrait.
Et si Marguerite est sans doute le personnage qui m'a le plus touchée, car plus fragile et sans doute la plus innocente de tous, c'est pour le personnage de Jeanne que j'ai le plus mal.
Car elle va devoir vivre avec sa rancœur envers Marguerite et tout ce qu'elle a pu lui dire, lui faire subir et tous les gestes tendres qu'elle n'a pas eus alors qu'elle aurait dû naturellement les faire.
La personne la plus à plaindre dans tout cela est sans doute Jeanne, vient juste derrière elle Lino pour lequel je n'ai eu, je dois bien le reconnaître, qu'une légère empathie.
Ecrit sous forme de roman choral, chaque personnage intervient à tour de rôle, ce roman est divisé en cinq parties : le temps de la colère, de la haine, de la vengeance, de l'amertume et du pardon.
Ce découpage m'a fait penser aux sept étapes du deuil, sauf qu'ici l'auteur décortique celles du pardon.
A chaque temps les quatre personnages principaux prennent la parole pour livre au lecteur leurs pensées, leur ressenti, tout ce qui les agite intérieurement et qu'ils ont trop longtemps laissé mijoter à l'intérieur d'eux.
Seul Milo ne parle pas, Milo est le centre du roman et de l'attention de chacun mais le lecteur ne saura pas ce que pense cet enfant de tout cela, d'un autre côté il n'en aura pas besoin car il le sait par la bouche des autres personnages.
J'ai beaucoup aimé cette construction, d'autant que le roman choral est un style qu'affectionne Valérie Tong Cuong et qu'elle manie à merveille, comme j'ai pu l'apprécier dans deux autres de ses romans : "Noir dehors" et "L'atelier des miracles".
De surcroît l'ensemble est extrêmement bien travaillé car ce roman est un fil unique qui se dévide sans fausse note : la pensée de l'un est dans la continuité de celle de l'autre, rendant ainsi l'ensemble très homogène et lisible d'une seule traite.
En le lisant j'ai évidemment pensé à d'autres romans traitant de la famille, du poids des secrets et des répercussions que le silence peut avoir sur certaines personnes, mais j'ai également tout le temps gardé à l'esprit qu'il en est de même dans toutes les familles et qu'aucune personne ne pourra dire en lisant ce roman "non je n'ai jamais connu une telle situation" ou "non je n'ai jamais rien eu à pardonner à qui que ce soit".
"Pardonnable, impardonnable" est un roman qui parle à chacun de nous, qui nous touche forcément, comme d'ailleurs les autres romans de son auteur, c'est pour cela que j'ai aussi autant apprécié cette lecture.

Une nouvelle fois Valérie Tong Cuong plonge dans les tréfonds de l'âme humaine, un thème qui lui est particulièrement cher et qu'elle ne cesse d'explorer dans tous ses romans, et elle aurait bien tort de ne pas continuer ainsi car son "Pardonnable, impardonnable" est un très beau roman humain que je recommande vivement.

Je remercie Babelio et les éditions J'ai Lu pour l'envoi de ce livre ainsi que pour la rencontre organisée le 22 mars 2016.

samedi 2 avril 2016

Retour sur les lectures de mars 2016


En mars, je n'ai lu aucun livre.
Si, si, c'est bien vrai.
Rien.
Pas la queue d'une page effeuillée.
Pas un seul livre sorti de la poussière.
Mais pourquoi ne me croyez-vous pas ?



(Désolée, j'ai une journée de retard)

Malgré la tartine littéraire lue en mars (comprendre "Le chardonneret") j'ai réussi à lire 5 autres livres et à en commencer un sixième.
Et bien je suis rudement fière de moi !
(même si en fait je ne devrais pas trop l'être car je n'ai sorti aucun livre de ma PAL ...)
A part ce chardonneret qui m'a laissé une impression mitigée (je parle toujours du livre, pas de la boisson légèrement alcoolisée du même nom) je n'ai eu que de belles lectures bien différentes les unes des autres.
Que dire de plus ?
Au mois prochain !

Service de Presse

"Pardonnable, impardonnable" de Valérie Tong Cuong

Emprunté à la bibliothèque

"Notre mère la guerre - Troisième complainte" de Maël et Kris
"Notre mère la guerre - Requiem" de Maël et Kris

Divers

"Le chardonneret" de Donna Tartt
"Evariste" de François-Henri Désérable
"Room" d'Emma Donoghue