jeudi 8 septembre 2016

Auschwitz expliqué à ma fille d'Annette Wieviorka


Peut-on "expliquer" à un enfant ce qui demeure, en partie, énigmatique ? Comment faire comprendre à une jeune fille d'aujourd'hui que les nazis dépensèrent tant d'énergie pour aller chercher aux quatre coins de l'Europe et exterminer des millions d'hommes, de femmes et d'enfants, simplement parce qu'ils étaient juifs ? Sur cette immense question de la Shoah, sur l'énigme du mal absolu, une historienne reconnue répond aux questions, très directes, de sa propre fille. (Seuil)

Annette Wieviorka est une historienne Française spécialiste de la Shoah et de l’histoire des Juifs au XXème siècle, directrice de recherche au CNRS.
Dans cet ouvrage de la collection Expliqué à … des éditions du Seuil, elle va répondre aux questions de sa fille sur la Shoah, sujet ô combien vaste et dont les questions qui en découlent sont infinies.

Ici, ce n’est pas le côté historique qu’Annette Wieviorka a cherché à expliquer, c’est tout le reste, tout ce qui demeure à ce jour sans réponse et le restera sans doute à jamais : "Car s'il m'est facile comme historienne de décrire Auschwitz, d'expliquer comment s'est déroulé le génocide des Juifs, il reste un noyau proprement incompréhensible, donc inexplicable : pourquoi les nazis ont-ils voulu supprimer les Juifs de la planète ?".
En tant qu’historienne elle explique les rafles, les ghettos, la différence entre les camps de concentration et ceux de mise à mort particulièrement à travers Auschwitz-Birkenau ; et puis elle essaye à travers les réponses fournies à sa fille de lui expliquer le pourquoi du comment de cette volonté d’anéantissement des Juifs, mais cela ne s’explique pas, il n’y a pas une réponse universelle et j’ai été touchée par le côté impuissant d’Annette Wieviorka.
Sans doute parce qu’elle fournit des éléments justes qui permettent à chacun de continuer à s’interroger.
Il y a aussi des phrases qui font écho à la situation actuelle de la France : "La France est, comme on dit, un Etat de Droit, c'est-à-dire un pays qui a des lois que tous doivent respecter.", pourtant à cette époque-là ce ne fut pas le cas et la France au lieu de protéger des personnes les a tout simplement livrées à la mort par le biais des rafles, et comment ne pas s’interroger par rapport à ce qui s’y passe aujourd’hui.
Ce court roman permet de bien resituer les événements et le contexte, l’auteur y aborde les points essentiels de cette période de l’Histoire, en expliquant notamment le camp de transit de Drancy : "Drancy ne ressemblait pas un camp comme tu peux l'imaginer. C'était en fait une cité de banlieue qui n'avait pas été terminée et n'avait donc jamais été habitée.", ainsi que l’importance des Sonderkommando, en rappelant qu’ils étaient "porteurs de secret" de par leur affectation aux crématoires : "La tâche horrible qu'accomplissait le Sonderkommando était un "terrifiant secret".".
En fait, je dirai qu’Annette Wieviorka y aborde tout ce que l’on n’apprend pas à l’école lorsque l’on étudie cette période, pour ma part en tout cas je trouve qu’avec le recul l’enseignement n’a été que superficiel et tout ce que j’ai lu et appris depuis le fut uniquement par mon intérêt pour ce sujet.
J’aurai beaucoup aimé lire un ouvrage tel que celui-ci à l’époque, et sans doute qu’un dialogue soit instauré dans la salle de classe.
Annette Wieviorka utilise toujours les mots justes, par exemple lorsqu’elle évoque les déportés et les conditions de vie dans les camps : "Dans des temps inhumains, être simplement humain relève parfois de l'héroïsme.".
Enfin, elle dit une phrase qui à la réflexion me paraît fort juste : "Auschwitz appartient à l'histoire de l'Europe. Si on y réfléchit bien, c'est probablement l'événement le plus européen de toute l'histoire du XXè siècle.", je n’avais jamais envisagé les choses sous cet angle et avec le recul je ne lui donne pas tort.
Je n’ai rien appris en lisant ce texte mais il a le mérite de poser le contexte et d’expliquer simplement et justement les événements.
Et puis ce fut intéressant de le lire quelques mois après avoir été à Auschwitz-Birkenau, car les questions que je me pose sont toujours aussi nombreuses et en appellent toujours d’autres, et je crois bien que cela ne cessera jamais.
J’ai en tout cas noté d’autres titres de cette collection qui pourraient m’intéresser et que je découvrirai avec plaisir.

Comme dit plus haut, "Auschwitz expliqué à ma fille" est une lecture que j’aurai apprécié en terminale au moment où l’on aborde la Seconde Guerre Mondiale et la Shoah, c’est à mon sens un très bon ouvrage pédagogique à mettre entre les mains des professeurs et des parents afin d’entamer une discussion sur ce sujet avec leurs élèves/enfants.


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