dimanche 19 février 2017

Corniche Kennedy de Maylis de Kerangal


Le temps d'un été, quelques adolescents désœuvrés défient les lois de la gravitation en plongeant le long de la corniche Kennedy. Derrière ses jumelles, un commissaire, chargé de la surveillance de cette zone du littoral, les observe. Entre tolérance zéro et goût de l'interdit, les choses vont s'envenimer. (Folio)

Ma première rencontre avec Maylis de Kerangal remonte à février 2012, avec "Naissance d'un pont".
Mes premières retrouvailles avec cette auteur datent aussi de 2012, juillet cette fois-ci, avec "Tangente vers l'est", lu dans le cadre d'un prix littéraire pour lequel je faisais partie du jury.
Et puis j'ai attendu avant de relire cette auteur, peur d'être déçue, trop de discours et d'éloges autour d'elle, il y a des auteurs que l'on aimerait garder secrets encore un petit peu.
Il a fallu attendre 2015 pour que je me décide à lire "Réparer les vivants", si beau, si fort, à tel point que je ne suis pas allée voir l'adaptation cinématographique, volontairement.
Il n'en était pas de même pour "Corniche Kennedy", tout de suite après le film j'ai eu envie de découvrir ce roman, l'un des premiers de Maylis de Kerangal.
Le grand saut, enfin, après tant d'années.

C'est l'été à Marseille, quelques adolescents désœuvrés des quartiers nord se regroupent sur la corniche Kennedy et défient les lois de la gravitation en sautant et plongeant : "Puisque frimer précisément, tchatcher, sauter, plonger, parader, c'est ce qu'ils font quand ils sont là, c'est ce qu'ils viennent faire.", toujours plus haut, sous le regard de Suzanne, jeune fille issue d'une famille aisée habitant sur la corniche, et du commissaire Sylvestre Opéra chargé de la surveillance du littoral.
Suzanne et Sylvestre Opéra ont un point en commun : ils sont fascinés par cette bande, la première voulant en faire partie et le deuxième fasciné par ces jeunes insolents à qui rien ni personne ne fait peur : "Fasciné par la vitalité du garçon, exaspéré par son arrogance, il se sent vieux, à cette heure, épuisé, et se dit qu'il donnerait beaucoup pour faire partie, ne serait-ce qu'une journée, de la bande de la Plate, gesticuler sur les pierres, draguer les filles, s'approprier le ciel. C'est une tentation intense.".
Ils ont quelque chose d'attachant ces minots, notamment Eddy et Mario, et Maylis de Kerangal a su les saisir au vol et les rendre vivants tout en simplicité, mais Suzanne elle reste un peu plus mystérieuse.
Et puis la pseudo enquête policière en toile de fond est morne, plate, sans grand intérêt.
Que vient-elle faire ici ?
Je ne saurai trop répondre à cette question, peut-être n'est-elle qu'un prétexte, un de plus, pour pouvoir observer en toute liberté ces jeunes qui sautent au vu et au sus de tous, méprisés par tous et méprisant à leur tour par leur insolente jeunesse qui se défie de tout.
Ils sont beaux ces jeunes, ils sont fascinants, ils ont quelque chose à dire mais personne ne semble prêt à les écouter.
Et puis, surtout, il y a le style de Maylis de Kerangal, et c'est sans doute ce qui sauve l'ensemble et ne m'a pas fait abandonner cette histoire qui au fond ne fait que survoler sans trop chercher à approfondir et creuser les personnages ou encore leurs motivations.
La fin de ce roman est d'ailleurs à l'image de l'histoire : complètement ouverte.
Je ne sais trop au final ce que j'attendais de ce roman pour lequel j'avais les images du film tout au long de ma lecture.
Si j'attendais Marseille, elle est bien là cette ville profondément ancrée dans ses racines méditerranéennes; si j'attendais une trame plus fournie j'ai été laissée sur la plateforme avant de m'élancer pour sauter.

"Corniche Kennedy" n'a pas tout à fait la même puissance que les autres romans de Maylis de Kerangal mais sa plume, elle, est toujours la même : aussi belle que poétique et ne serait-ce que pour cela, ce roman mérite d'être découvert.

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