lundi 5 juin 2017

Les jours de mon abandon d'Elena Ferrante


Olga, trente-huit ans, un mari, deux enfants. Un bel appartement à Turin, une vie faite de certitudes conjugales et de petits rituels. Quinze ans de mariage. Un après-midi d’avril, une phrase met en pièces son existence. L’homme avec qui elle voulait vieillir est devenu l’homme qui ne veut plus d’elle. (Folio)

Olga est une femme heureuse, mariée depuis de nombreuses années au même homme et mère de deux enfants, mais son univers bascule le jour où son mari la quitte pour une autre, ainsi que son équilibre mental.
Olga commence petit à petit à perdre pied : "Le seul signe extérieur de mon désarroi intérieur fut ma disposition au désordre et la faiblesse de mes doigts : plus l’angoisse montait, moins ils se refermaient solidement autour des choses.", mais résiste et se cache à elle-même la vérité : "Je n’étais pas une femme mise en pièces sous le coup d’une rupture, d’une absence, jusqu’à en devenir folle, jusqu’à en mourir.", jusqu’à basculer dans une folie dangereuse qui la pousse à faire du mal aux autres mais surtout à elle-même : "Un enchevêtrement de rancœurs, un sentiment de revanche, la nécessité de mettre à l’épreuve la puissance offensée de mon corps étaient en train de détruire tout ce qui me restait en fait de bon sens.", quitte à ce qu’Olga se détruise.

Il me fallait découvrir Elena Ferrante sous un autre jour que celui de "L’amie prodigieuse".
La curiosité de voir son style en dehors de cette saga romanesque, mais aussi, il faut bien le reconnaître, voir ce qu’elle avait dans le ventre et sous la plume.
En choisissant ce roman, je n’ai pas été déçue du voyage et sans doute que si j’avais commencé à la lire avec celui-ci je ne me serai pas du tout attendue à la retrouver à écrire une saga Napolitaine.
Car ici on est plutôt loin de la saga de deux jeunes femmes dans une Italie en mouvement, bien qu’il soit question d’une femme blessée qui va aller très loin dans sa folie pour la raison qu’elle a été abandonnée par l’homme qu’elle aime, celui à qui elle a dévoué sa vie et ses plus belles années.
Son héroïne est une battante, c’est une féroce qui a la rage au ventre, c’est une guerrière qui fonce droit en avant sus à l’ennemi : "J’étais intacte, je resterais intacte. A ceux qui me font du mal, je leur rends la pareille. Je suis le huit d’épées, je suis la guêpe qui pique, je suis le serpent sombre. Je suis l’animal invulnérable qui traverse le feu sans se brûler.", mais qui est avant tout humaine.
Et côté tourments, Elena Ferrante ne va pas l’épargner, tant Olga va plonger dans une folie où le lecteur se demande à de nombreuses reprises si elle va réussir à reprendre pied.
Mais il n’y a pas point à douter, c’est bel et bien du Elena Ferrante, j’ai retrouvé dans ce roman sa plume féroce et son regarde exacerbé sur le monde et les tréfonds de l’âme humaine.
Le roman est écrit dans un style très viscéral qui peut gêner et mettre mal à l’aise certains lecteurs, mais quelle puissance.
Ce roman m’a enfermée, dans le bon sens du terme, dans la folie d’Olga, j’ai eu l’impression d’étouffer ou de me trouver dans une pièce close où la clé a été perdue, mais j’ai ainsi pu toucher du doigt les égarements d’Olga, la douleur de cette femme blessée au plus profond de sa chair par amour.
Que cela peut-être cruel, l’amour, mais aussi "Quel écumeux et complexe mélange est un couple.".
Car étrangement, c’est bel et bien de couple qu’il est question dans ce roman, même si Olga est seule avec ses enfants pendant la quasi intégralité du récit et que le mari, le salopard maudit, ne fait que de brèves apparitions.

Avec "Les jours de mon abandon", Elena Ferrante met sa plume au service de la folie d’une femme bafouée et livre un roman viscéral qui remuera sans nul doute le cœur et les tripes des lecteurs.

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