samedi 3 décembre 2016

Zarbie les yeux verts de Joyce Carol Oates



Francesca est surnommée Franky mais aussi Zarbie les yeux verts, lorsque l’adolescente rebelle pointe sous la carapace. Elle habite à Seattle avec sa sœur Samantha et leur demi-frère Todd. Elle a tout pour être heureuse : un père riche et célèbre, une mère artiste et adorable, une somptueuse maison. Elle voue à son père Reid Pierson, un reporter sportif célèbre, une véritable vénération. Mais les apparences sont parfois trompeuses. Franky sent bien que quelque chose ne va pas. (Scripto)

Francesca, surnommée Franky, est la fille de Reid Pierson, ancien sportif désormais devenu un célèbre reporter dans ce milieu, et de Krista, une femme au foyer avec un côté artiste.
Elle a un demi-frère, Todd, né d'une précédente union de son père, et une petite sœur : Samantha.
Cette jolie et riche famille Américaine bien comme il faut habite à Seattle.
Mais les apparences sont parfois trompeuses, sous la jeune fille sage se cache son double rebelle que Franky appelle Zarbie les yeux verts : "Tu devrais voir tes yeux ! Zarbie les Yeux Verts ! T'es complètement cinglée !", un personnage qui la désinhibe, d'autant que Franky se rend bien compte qu'à la maison aussi quelque chose ne va pas, sa mère Krista passant de plus en plus de temps loin de ses enfants et de son mari dans son chalet à Skagit Harbor où elle se consacre à son art.
Femme au foyer en mal de création ou femme cherchant à fuir quelque chose ou quelqu'un ?

J'ai découvert Joyce Carol Oates avec "Mudwoman", une lecture exigeante mais fantastique qui m'avait permis d'apprécier la très belle plume de cette auteur.
Je savais qu'elle avait aussi écrit quelques romans pour la jeunesse, c'est donc avec un récit de ce cru que j'ai continué ma découverte de cette auteur.
L'avantage d'un roman destiné aux adolescents, en tout cas quand il s'agit de Joyce Carol Oates, c'est que c'est un peu plus abordable d'un point de vue psychologique que ses livres à destination des adultes, c'est en tout cas ce qu'il m'a semblé.
Mais que l'on ne se méprenne pas, la psychologie des personnages, ici de Franky et de son père Reid, est extrêmement travaillée et fouillée.
La personnalité de Franky, et par ricochet de Zarbie, est assez particulière, pour ne pas dire perturbée, par les événements qui se déroulent au sein de son foyer : ils ne disent pas leur nom mais la jeune fille le ressent et sait sans le dire ce que subit sa mère.
Disons que Zarbie est une façon pour elle d'affronter la vérité sans toutefois le faire directement, un parti pris que j'ai énormément apprécié.
Ainsi, quand Franky sait au fond d'elle ce qui se passe et pourquoi sa mère a fui le foyer familial, elle préfère se ranger du côté de son père et finit même par détester sa mère et avoir à son égard des mots durs et blessants : "Elle était si faible, si pathétique ! Elle ne me faisait même plus de peine, à présent, tout ce que je voulais, c'était m'éloigner d'elle.".
Et même après la disparition mystérieuse de celle-ci, ce sentiment de protection, voire d'auto-défense, se renforce encore plus, la menant même à refuser de parler, et par conséquent de dire la vérité, lors des entretiens avec les enquêteurs : "Personne ne peut me forcer à me souvenir. J'ai le droit d'oublier.".
Zarbie est peut être une forte tête mais Franky est une jeune fille en souffrance, tout comme sa sœur Samantha, que d'ailleurs parfois elle n'hésite pas à repousser afin de pas affronter le chagrin qui l'habite également.
Ce personnage m'a beaucoup touchée, je trouve son attitude et ses réactions très réalistes pour une jeune fille de cette âge et je suis agréablement surprise de voir à quel point Joyce Carol Oates a su frapper juste dans la réaction de ses personnages et leurs attitudes.
L'autre personnalité forte et fascinante de ce roman, c'est bien entendu Reid Pierson, ce père à l'amour toxique, il n'y a pas d'autre terme pour le désigner.
Qu'est-ce que j'ai eu envie de hurler en lisant sa façon d'agir, un mot s'est imposé d'emblée dans mon esprit pour le qualifier : pervers narcissique.
Et clairement, c'en est un.
A tel point que très rapidement s'instaure un climat malsain et une certaine tension qui ne se relâchent qu'à la fin de la lecture.
Une nouvelle fois Joyce Carol Oates m'a bluffée avec son style, ici très sec, et sa tenue irréprochable de la tension psychologique qu'elle a instauré dans ce récit.
Elle livre-là un roman pour adolescents subtil qui ne peut donner qu'envie de découvrir cette auteur.
Tout y est juste et parfaitement analysé, c'est tout à fait abordable par les adolescents à partir de 13 ans, voilà une lecture qui me marquera certainement encore longtemps.

"Zarbie les yeux verts" est un roman psychologique particulièrement sensible et émouvant, mené d'une main de maître par Joyce Carol Oates, un livre dont je recommande vivement la lecture.

4 commentaires:

  1. Vraiment étonnant de constater la puissance des romans pour adolescents de Joyce Carol Oates. Pas moins percutants que ses textes pour adultes.
    Pas encore lu celui-là, mais noté depuis longtemps.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Gros coup de cœur pour ma part, j'avais hésité entre celui-là et "Sexy" mais bien entendu je l'emprunterai un peu plus tard.

      Supprimer
    2. Je lis "Sacrifice" en ce moment.
      Faut avoir les nerfs solides !!!

      Supprimer
    3. J'ai "Carthage" en attente aussi, pour plus tard !

      Supprimer