samedi 21 janvier 2017

La porte du ciel de Dominique Fortier


Au cœur de la Louisiane et de ses plantations de coton, deux fillettes grandissent ensemble. Tout les oppose. Eleanor est blanche, fille de médecin ; Eve est mulâtre, fille d'esclave. Elles sont l'ombre l'une de l'autre, soumises à un destin qu'aucune des deux n'a choisi. Dans leur vie, il y aura des murmures, des désirs interdits, des chemins de traverse. Tout près, surtout, il y aura la clameur d'une guerre où des hommes affrontent leurs frères sous deux bannières étoilées. Plus loin, dans l'Alabama, des femmes passent leur vie à coudre. Elles assemblent des bouts de tissu, Pénélopes modernes qui attendent le retour des maris, des pères, des fils partis combattre. Leurs courtepointes sont à l'image des Etats-Unis : un ensemble de morceaux tenus par un fil – celui de la couture, celui de l'écriture. (Les Escales)

Dans "La porte du ciel", Dominique Fortier traite du destin de deux fillettes, puis femmes, que tout oppose et que rien ne prédestinait à se rencontrer et à vivre ensemble : Eleanor est blanche, fille de médecin et épouse d'un propriétaire d'une plantation de coton, Eve est mulâtre, fille d'esclave; tout cela dans l'Amérique de la Guerre de Sécession.
Parfois, le récit est aussi ponctué de l'histoire de femmes qui cousent et assemblent des morceaux de tissus en attendant que leurs maris, leurs pères, leurs frères ou leurs fils reviennent des combats.

Sur le papier, ce récit avait beaucoup d'atouts pour me plaire, pour tout dire le chapitre d'ouverture était à la fois intrigant et poétique, mais au final mes attentes ont été déçues dans l'ensemble.
Le contexte, la Guerre de Sécession, est intéressant, d'autant qu'il est abordé de façon originale : à la fois de façon lointaine, par le prisme de femmes vivant loin du front, mais aussi par le biais de deux femmes qui se trouvent chacune d'un côté de la barrière, Eleanor est de par sa position contre l'abolition de l'esclavage, à l'inverse d'Eve.
Mais il y a aussi une certaine lucidité du personnage d'Eve quant à la précarité de son émancipation et sa relative liberté à la fin du conflit : "Ce mot de "liberté" et ses frères - "égalité", "émancipation", "union" - étaient des osselets qu'on secoue dans sa main avant de les jeter par terre, où ils forment des amoncellements précaires.".
L'auteur a su recréer les voix divergentes de l'époque qui a vu se désunir des états qui auparavant l'étaient ; "Dans des Etats portant de jolis noms de femmes, la Virginie, la Caroline du Sud, des voix s'élevaient, de plus en plus fortes, demandant : puisque les Etats avaient choisi de s'unir pour leur bénéfice commun, chacun n'était-il pas aussi libre de quitter cette union quand et comme il l'entendait ?".
Le fond historique est donc abordé par touche et sous un regard quelque peu différent.
Je n'ai rien non plus à dire sur la plume de Dominique Fortier, je l'ai trouvée belle et maniant assez bien l'art de l'ellipse, c'est effectivement une jeune auteur intéressante à suivre.
Néanmoins, les personnages me sont restés trop distants, entre une Eleanor qui subit sa vie et dont on ne sait pas trop ce qu'elle en pense, hormis vers la fin où elle commence simplement à se dévoiler, et une Eve qui reste muette quasiment pendant tout le récit.
Le lecteur ne sait finalement pas tant que cela les tourments intérieurs qui agitent ces personnages, c'est sûr il y a des murmures, mais cela s'arrête-là.
La relation entre Eleanor et Eve n'est pas non plus vraiment développée, elle n'est qu'amorcée alors que j'attendais quelque chose de plus approfondi, pas une relation restant au stade embryonnaire, d'autant que le lecteur voit rarement ces deux personnages en interaction l'un avec l'autre.
Sans doute y-a-t'il un peu trop d'ellipses dans cette histoire, dommage car cela se fait au détriment des personnages.
Construite comme un patchwork, l'histoire aurait pu être tellement autre chose, quant à l'auteur elle n'a pas réussi, et c'est regrettable, à créer la moindre empathie envers ses deux héroïnes féminines, alors que son style est pourtant agréable.

J'ai attendu quelque chose pendant toute ma lecture qui n'est jamais venu, voilà pourquoi "La porte du ciel" est un roman qui ne m'a finalement pas emballée et m'a même laissée sur ma faim.

Je remercie Babelio et les éditions Les Escales pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une rencontre avec Dominique Fortier.

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